24 avril 2016

Marcel… 3e génération en soixante ans

1re génération
Garbis Karaboghossian, originaire du village d’Afion en Arménie, arrivé en France en 1950 à l’âge de 45 ans, s’installe à Issy avec son épouse, d’origine italienne. Il est d’abord coiffeur, boulevard Rodin où il crée parallèlement un atelier de fabrication artisanale de chaussures.

Marcel (à droite) dans les années 1950… 
En 1954, il décide d’acquérir un fonds de commerce, rue de la République, et ouvre le premier magasin arménien de chaussures de la ville. Il l’appelle « Marcel » en référence au surnom que lui ont donné ses amis français. Il y poursuit aussi son activité de « cordonnier ». Ses voisins sont alors le « Cours des Halles » de M. Papazian, et un fournil aujourd’hui disparus. Devant c’est la station d’autobus (ci-dessus). A l’époque, les fournisseurs en chaussures s’appellent Peter Kaiser (marque allemande), Pindière, Corinne.

2e génération
En 1972, Arthur le fils qui travaille déjà au magasin, succède à son père et à sa mère. Secondé par son épouse Josiane, Arménienne, il va tenir le commerce pendant plus de quarante ans ! Les fournisseurs évoluent et s’appellent dorénavant : Mephisto, Alexandira, Marco et autres Siux.

3e génération
Frank, le petit-fils, beaucoup plus attiré par le magasin que par l’école… participe dès l’âge de 8 ans à l’activité de ses parents et apprend ainsi, sur le tas, les méthodes de vente. Le 1er décembre 2009, après trois ans de travail en binome avec son père, Frank prend seul la responsabilité du magasin et poursuit avec bonheur l’œuvre familiale d’un commerce de proximité.
Actuellement, sa clientèle à 95% féminine, attachée au caractère « personnel » du magasin, vient souvent de très loin. Elle ne se doute pas que, sous cette discrète boutique, se trouve un immense sous-sol, s’étendant sous la pharmacie et la banque voisines, où s’accumulent des centaines de boites à chaussures… de quoi toujours la satisfaire !

Le magasin aujourd'hui… ©PCB
Ainsi, avec ses soixante ans d’existence, « Marcel » entre dans le club des plus anciens commerces de la ville. Denis Hussenot.

18 avril 2016

Le couple Dutilleux-Joy. Des musiciens passés par Issy

Geneviève Joy et Henri Dutilleux sortent de l'oubli grâce à une de leurs amies, dénommée Geneviève aussi, qui s'est confiée à Pascale, à l'occasion du centenaire de la naissance du compositeur. Découverte.


Le couple Dutilleux-Joy. © XDR

Notre Geneviève est une altiste, 1er prix au Conservatoire de Paris en juillet 1942. Quelques semaines plus tard, elle est contactée par les Concerts Lamoureux qui lui demandent de jouer le Requiem de Fauré lors du concert de Toussaint. Jusqu’alors il n’y avait pas de femmes dans les orchestres sauf au sein des orchestres symphoniques et lyriques de la Radio car « on ne voit pas les femmes ».  Elle reste cinq ans dans l’orchestre Lamoureux et évoque les répétitions le matin du jeudi et du vendredi ; le samedi après-midi avant le concert du dimanche après-midi. 

Rencontre avec Geneviève Joy
Elle passe une année dans la même classe de musique d’ensemble avec Geneviève Joy, entrée à 20 ans au Conservatoire de Paris en 1939 et 1er prix de piano. Les deux musiciennes deviennent amies. En compagnie de trois musiciens (2 violonistes, 1 violoncelliste) qui ne concourent pas, Geneviève joue le quatuor de Ravel dans lequel la partition d’alto, sa spécialité, est très importante. Elle gagne ainsi sa première médaille pour son concours de musique de chambre. Geneviève, après avoir élevé ses enfants rejoint avec grand plaisir, sur suggestion de son amie Geneviève Joy, un orchestre d’amateurs parisiens.

Passage à Issy
Geneviève Joy avait épousé le compositeur Henri Dutilleux en 1946 dont elle fut aussi une interprète privilégiée. Le couple habite quelques mois au 5 ( ? ) rue Claude Matrat (ci-dessous) dans un étage élevé, avant d’en partir pour résider à Paris 12 rue Saint-Louis-en l’Île (3e étage ) où Geneviève est allée  plusieurs fois.


Rue Claude-Matrat, Issy-les-Moulineaux. © XDR

Henri Dutilleux
Henri Dutilleux accepte d’être le parrain du troisième fils de Geneviève et de son mari Pierre. « Il était charmant, pas du tout intimidant ».  Pourtant, il est un très célèbre compositeur français. Sa famille est originaire de Douai mais doit fuir les armées allemandes au début de la Grande guerre. Il naît à Angers en 1916 puis retourne dans le Nord où il commence ses études musicales au conservatoire de Douai. Il est 1er Grand prix de Rome en 1938. En 1942, il est chef de chœur à l’Opéra de Paris. De 1944 à 1963, il travaille au Service des Illustrations musicales de la Radiodiffusion française. Son œuvre est immense et variée.

Partition d'Henri Dutilleux. © XDR
En 1938, sa première composition L’anneau du Roi lui vaut le 1er Grand prix de Rome et le séjour d’un an à la Villa Médicis. Parmi toutes ses créations, on peut citer un concerto pour violoncelle destiné à Rostropovitch qu’il hébergea lorsque celui-ci et sa femme se réfugièrent à l’ouest. Ce concerto fut créé à Aix-en-Provence en 1969. De plus, un concerto pour violon fut écrit pour Isaac Stern qui le créa. Henri Dutilleux reçut le Grand prix national de musique en 1967 pour « l’ensemble de son œuvre » mais il refusa toujours de faire partie de l’Institut en raison de la suppression du Grand prix de Rome pour la musique. Geneviève Joy fut professeur au Conservatoire de Paris mais donna aussi régulièrement des cours dans un conservatoire au Japon où elle se rendait régulièrement.

L'association Dutilleux
Le couple Dutilleux-Joy possédait une maison dans la commune de Candes-Saint Martin (Indre-et-Loire). Le piano à queue de Geneviève Joy y est précieusement conservé. La mémoire des deux musiciens y est toujours honorée grâce à l’association Dutilleux. Celle-ci gère la maison du couple actuellement en pleins travaux de rénovation qui s’appelle "Foyer Joyeux". Ce nom associant le nom des deux artistes accueillera des musiciens en résidence ainsi que des concerts. De plus, un concours Dutilleux est organisé par la région Centre-Val de Loire.

Un grand merci à Geneviève dont les musiciens favoris sont Fauré, Debussy et Chopin. Merci également à son fils Philippe, organiste, qui apprécie Bach plus que tout sans oublier Odette qui m’a fait connaître son amie. P. Maestracci

Pour en savoir plus :






un livre extrêmement minutieux vient de paraître pour le centenaire de la naissance de Henri Dutilleux Pierre Gervasoni,  Henri Dutilleux (co-édition Actes/Sud, Philharmonie de Paris, 2016).

14 avril 2016

Issy à travers le prisme des cinq sens

Le Cherche Midi éditeur prépare un bel ouvrage sur notre commune pour la fin de l'année. Comme vous avez pu le lire dans le Point d'Appui de mars, un concours de nouvelle est ouvert à tous sur le thème :

Issy à travers le prisme des cinq sens


Alors, n'hésitez pas. En 6000 signes maximum (espaces compris), laissez votre imagination s'exprimer. Vous avez jusqu'au 30 avril pour envoyer votre texte à l'adresse mail suivante : adesanderval@cherche-midi.com - en indiquant vos nom, prénom, âge, adresse postale et n° de téléphone.

10 avril 2016

Réponse - De drôles de lettres


Alors, vous avez trouvé !

Le monogramme, J et C entremêlés par un E de cette imposte vitrée (ci-dessus), évoque les bureaux d’une entreprise qui occupait les numéros 3, 5 et 7 de la rue Renan (ci-dessous), soit tout au début du grand axe isséen. Il s’agissait de Javel La Croix qui fabriquait la célébrissime eau de javel.

Rue Renan. On aperçoit, à l'extrême droite, la porte vitrée et son monogramme.
L'eau de javel fut fabriquée pour la première fois en 1777 dans une manufacture installée au hameau de Javel dans la plaine de Grenelle. Elle appartenait au comte d’Artois, frère de Louis XVI et futur Charles X. Le nom du hameau fut donné à ce produit utilisé comme décolorant par les blanchisseries de l’époque. On en découvrit ensuite le pouvoir désinfectant. L’eau de javel est formée par l’action du chlore sur une dissolution de potasse.

Foucher Lepelletier, un autre nom d’Issy-les-Moulineaux est associé à cette eau si particulière. C’est le nom d’une rue depuis 1894. Elle évoque la mémoire d’Edmond Foucher Lepelletier, directeur de l’usine produisant l’eau de javel sur le lieu même de l’antique manufacture, entre les rues Cauchy et Leblanc (ex-rue de Javel). La rue Foucher Lepelletier y menait ainsi qu’à une plus petite usine sur le quai d’Issy. La superficie en était de 2 000 mètres carrés et il n’y avait que 11 ouvriers. L’usine chimique parisienne fut remplacée au XXe siècle par les usines Citroën et dorénavant par le parc du même nom.

E. Foucher Lepelletier
Edmond Fouché [sic] qui a 27 ans, comme en témoigne l’acte de mariage du 16 avril 1836, épouse Célie Le Pelletier « fille d’un fabricant de produits chimiques ». La cérémonie est célébrée à Issy par le maire Dumez. Fouché est « architecte » au moment de son mariage mais cela ne l’empêche pas de prendre la succession de son beau-père à la direction de l’usine. Il reçoit la Légion d’Honneur des mains de Louis-Napoléon Bonaparte en 1851. Le Musée Français de la Carte à Jouer conserve un buste en marbre (ci-contre) de l’industriel ainsi qu’un tableau illustrant la remise de médaille qui s’est déroulée dans la cour de l’usine. Edmond Fouché transforme son nom en Foucher Lepelletier. Il meurt en 1889, cinq ans avant qu’une rue isséenne lui rende hommage.


Merci à la charmante Odette qui m’a mise sur la piste de l’eau de javel. Texte et photos P. Maestracci.

5 avril 2016

Jeu - De drôles de lettres

Avec le printemps qui revient, reprenons nos bonnes habitudes et partons le Nez en l'Air 
à la découverte de notre commune.
Quelles sont donc ces lettres imbriquées et, surtout, où allez-vous les trouver ? 
Un indice : une histoire d'eau.
A vous de jouer …




Réponse dimanche 10 au soir

1 avril 2016

Le CNET - Jean Boyer témoigne

Alors que le CNET (Centre national d'études des télécommunications), devenu Orange Labs, s'apprête à déménager, donnons la parole à Jean Boyer, qui fit une partie de sa carrière dans ces bureaux.

Orange Labs, côté avenue du Général Leclerc, Issy. © A. Bétry

L'histoire de Jean Boyer ne nous est pas inconnue. Expédié en 1940 en camp de travail dans le cadre du STO, il a le courage de s'en évader et le hasard fait qu'avec ses compagnons ils rencontrent des évadés de guerre français. Ensemble ils forment une compagnie et rejoignent les forces combattantes de l'armée slovaque. Jean Boyer a écrit son histoire dans un livre et nous avait laissé un témoignage.

Les débuts au CNET
Jean Boyer. © A. Bétry
« Quand j'arrive au CNET en 1970, je venais de la poste de Clermont-Ferrand, où j'avais été secrétaire général au niveau national de la CFDT-PTT. Je désirais prendre d'autres fonctions. A l'époque, les PTT offraient le choix : la Poste, les Télécoms et les services financiers avec les chèques postaux.
Je choisis les Télécoms, bien que je ne sois pas ingénieur.  Les PTT à l'époque comptait 300 000 agents. Ils étaient gérés par un budget annexe du budget général (de l'administration), qui passait chaque année devant l'Assemblée nationale pour y être voté. J'ai donc eu accès aux nombreux dossiers de ces budgets. J'y remarquai parfois des anomalies, et au cours des différentes séances du Conseil auxquelles j'assistais, je ne manquai pas de dénoncer ces dysfonctionnements et de proposer, de façon logique et constructive, des améliorations. Mes analyses et mes observations, accompagnées d'un certain bon sens, me gratifièrent d'une certaine reconnaissance. »

Création de la comptabilité analytique.
« Un beau jour, M. Libois, le directeur du CNET, me propose une mission de confiance, à laquelle il n'avait pas obtenu satisfaction de la part de ses ingénieurs : la création d'une comptabilité analytique.
Face aux conjonctures et aux nouvelles relations internationales, le besoin de connaître le coût de revient d'un projet ou d'une recherche se fit nettement sentir. Pour commercialiser l'un d'eux, la connaissance de leur prix de fabrication devenait indispensable.
Avec la volonté d'être l'unique chef de cette opération, je m'entourai d'une douzaine de personnes, dont deux ingénieurs, des informaticiens, des comptables. Je parvins, grâce au soutien d'un général des armées, à faire qu'un appelé du contingent effectue son service militaire dans cette équipe.
Travaillant avec la Défense, un général assistait au Conseil supérieur des PTT et le CNET avait sur la base aérienne de Villacoublay un DC 3 (Dakota) à sa disposition pour assurer les liaisons avec les différents sites du CNET, Lannion en particulier où j'ai eu plusieurs fois l'occasion de me rendre.
En l'espace de treize mois, ce GEG (Groupe d'étude et de gestion) que je dirigeais, a mis en marche la comptabilité analytique du CNET. C'était dans les années 1973-74. »

Administrateur des PTT
« En fin de carrière, à titre exceptionnel je fus nommé administrateur des PTT. Ce rang étant habituellement réservé aux personnes ayant suivi un cursus universitaire et passé le concours des administrateurs. Après autorisation ministérielle, je suis parvenu à ce titre, tout en ayant commencé comme simple employé de la Poste à Clermont-Ferrand. Pour mémoire, rappelons qu'en 2007 le CNET est passé à… l'Orange !
Fernand Raynaud aurait pu faire un sketch de mon histoire !… » Propos recueillis par Alain Bétry


Pour en savoir plus :
Jean Boyer est chevalier de la Légion d'honneur à titre civil pour son parcours professionnel et officier de la Légion d'honneur à titre militaire, par le président de la République François Mitterrand, pour son passé et son engagement aux cotés des forces slovaques  http://www.historim.fr/2012/05/jean-boyer-la-resistance-en-slovaquie.html

Orange Labs, côté Rond-Point Victor Hugo, Issy. © A. Bétry