26 mai 2017

De Gaulle décolle de l'héliport - 29 mai 1968

L’amiral Flohic, aide de camp du président de la République Charles de Gaulle, évoque dans ses souvenirs la disparition spectaculaire de celui-ci lors des événements de mai 68.

Héliport de Paris-Issy, 29 mai 1968. © XDR.
Curieusement, l’amiral Flohic parle du départ en hélicoptère de M. et Mme de Gaulle à l'« aéroport d'Issy » le 29 mai 1968. Il s’agit de l’Héliport de Paris installé sur le champ de manœuvres réquisitionné par l’armée aux dépens du territoire isséen en 1893. Par la suite, ce terrain servit aux expérimentations de l’aviation naissante avant d’être transformé en héliport toujours en activité. 

Le secret du départ du chef de l’État est favorisé par un vol en rase-mottes et le silence radio. Le plein de kérosène est fait à Saint-Dizier en Haute-Marne. L’arrivée à Baden-Baden auprès du général Massu et des troupes françaises d’occupation en Allemagne a lieu vers 12h50/13h10. Le général de Gaulle repart à 16h30 pour Colombey-les-deux-Églises d’où il téléphone à son Premier ministre Georges Pompidou pour réunir un Conseil des ministres le lendemain.

Charles de Gaulle à la télévision, le 30 mai 1968. © XDR.
Après une disparition mystérieuse, le retour suivi, le lendemain 30 mai, d’un discours solennel à la télévision marque les esprits. P. Maestracci

20 mai 2017

Mai 1871 - Issy et la Commune de Paris

Nous avons consacré un certain nombre d'articles à la Commune de Paris et les dégâts occasionnés  dans la commune d'Issy en mai 1871 : combats du Fort, destruction du château des Conti et du Séminaire, etc. Nous voici plongés au sein même d'une réunion, organisée le 6 mai 1871 en Comité secret, des membres du Conseil de la Commune. Il est question d'Issy et de ce Comité de Salut public mis en place le 1er mai 1871, non sans une forte opposition des membres du Conseil de la Commune. Ses attributions ne sont pas précisées et provoquent alors des discussions et une remise en cause du premier comité. Un second comité sera élu le 8 mai. Mais sans grande réussite. En voici quelques extraits.

Félix Pyat, [avocat, journaliste, élu le 26 mars au Conseil de la Commune, fait partie du Comité de Salut public du 1er au 8 mai] prend la parole.

Félix Pyat
Ce n’est pas comme membre du Comité de salut public que je demande la parole. Je ne la demande que pour m’expliquer sur le fait d’avoir donné l’ordre de déplacer des généraux. Là-dessus, j’ai déclaré que je n’avais pas signé d’ordre de cette nature et que j’ignorais absolument qu’on en eût donné ; on m’a produit alors une pièce au bas de laquelle se trouve ma signature : tous ceux qui ont fait partie d’une commission exécutive savent que l’on a tant de signatures à donner qu’il est absolument impossible de lire toutes les pièces que l’on a à signer. Je ne dis pas cela pour m’excuser, remarquez bien ; pour moi, le point capital est ceci : Même en supposant que j’eusse eu, malgré la fatigue, pleine connaissance de la pièce, cette pièce est en complète conformité avec la déclaration que j’ai faite, attendu que Wroblewski [Walery Wroblewski, nommé par le conseil de la Commune commandant des fortifications entre Ivry et Arcueil] était chargé de la défense d’Issy ; donc il n’y a pas eu de déplacement. 
Gustave Paul Cluseret
Maintenant je déclare que la Commission exécutive, que nous avons eu l’honneur de remplacer, a fait arrêter Cluseret [Gustave Paul Cluseret, délégué à la Guerre de la Commune de Paris] à la suite des événements d’Issy. Vous-même, Commune, tout à l’heure, vous étiez sur le point de faire déposer dix canons sur les remparts…

Un membre : Elle en a le droit.

Félix Pyat : Oui, vous en avez le droit, mais, quand j’ai demandé qu’on délimitât mes pouvoirs, pourquoi m’a-t-on répondu que nous avions des pouvoirs illimités ? Nous n’avons pas, du reste, usé de ces pouvoirs, je le répète, puisque nous n’avons pas déplacé un général ; nous avons dit simplement: «Veillez à votre poste. »

Dominique Régère [élu membre au Conseil de la Commune le 26 mars, vote pour la création du Comité de Salut public, est arrêté après la Semaine sanglante] répond :

Dominique Régère.
J’entends défendre le Comité de salut public d’une manière absolue. Je ne m’occupe pas des personnalités ; je ne parlerai qu’au point de vue des principes. Je dois dire que mes amitiés personnelles sont surtout du côté des hommes que je combats. Un vote a eu lieu, l’on a constitué un Comité .de salut public et l’on a nommé le personnel de ce Comité, et, avant que ce Comité se soit assis, avant qu’il ait fait un seul de ces actes de salut qu’on lui demande, on l’attaque; c’est d’une suprême injustice. L’on a parlé de délimitation de pouvoirs ; or, j’ai été d’accord avec ceux qui veulent que ces pouvoirs soient illimités parce que la position est suprême ! Ce Comité a donc tout pouvoir. 

Walery Wroblewski.
Que lui reproche-t-on? D’avoir fait déplacer un général; rappelez-vous la situation. Quand nous avons appris les événements dont Issy avait été le théâtre, est-ce que nous n’avons pas tous dit qu’il fallait agir énergiquement? N’étions-nous pas disposés à y aller tous ? L’on a dit à Wroblewski qui commandait la rive gauche de la Seine : «Allez, allez à Issy!» Et vous venez incriminer, mettre en cause, pour avoir donné cet ordre, le personnel tout entier du Comité de salut public. C’est de toute injustice. Le reproche n’émane du reste que des hommes qui ont combattu en principe la constitution du Comité et qui se sont abstenus quand il a été question d’en nommer le personnel.

(Aux voix. Aux voix!)

Régère : Une autre objection… (Interruptions.) Je sais bien qu’on voudra me couper la parole; je sais qu’on voudra m’empêcher de parler; mais je ne m’en étonne pas, j’y suis même habitué; de même que l’on a supprimé dernièrement mon discours au sujet des finances, alors que ceux de mon adversaire y étaient tout au long, de même ce que je dis ici sera sans doute supprimé, mais cela m’importe peu.

(Interruptions.)

Le Fort d'Issy, mars 1871. Walery Wroblewski, commandant
des fortifications,était chargé de sa défense. Mais le 8 mai, à onze heures,
le dernier défenseur quitte le fort bombardé par les Versaillais.
Les débats vont continuer sans résultat. Pendant ce temps-là les combats s'accélèrent. Le 21 mai 1871, les Versaillais entrent dan Paris par la porte du Point du Jour à Boulogne. C'est le début de la Semaine sanglante.



17 mai 2017

Conférence : Issy, 9000 ans d'histoire

Quel succès ! Une bonne soixantaine de personnes était venue écouter notre Historimienne Pascale raconter les grands moments de notre commune, des temps préhistoriques à aujourd'hui. Il faisait beau, les documents projetés étaient fort intéressants et les questions posées à la fin de la conférence fort pertinentes.

Conférence du 16 mai 2017, Résidence du Parc, Issy. © XDR

Parmi les faits marquants évoqués :

- Une voie romaine traversait la commune. Il s'agit de l'axe Renan-Général Leclerc-Victor Cresson-Verdun… situé à la limite des crues de la Seine. Les Romains avaient vu juste. En 1910, toutes les rues et tous les bâtiments situés ente la Seine et cet axe furent noyés sous les eaux.

- Au temps des Mérovingiens, un village de 300 à 400 habitants s'installe autour de l'actuelle église Saint-Etienne. Dans la crypte, que les Historimiens ont eu la chance de visiter, deux chapiteaux du VIIe siècle rappellent cette présence.

- Les siècles passent et voici que s'installe, au XVIIe siècle, à Issy la célèbre Marguerite de Valois, la première épouse du roi Henri IV, celle que l'on connaît sous le nom de "reine Margot". Elle possède une superbe résidence, agrémentée d'un vaste parc, à l'emplacement des actuels Séminaire Saint-Sulpice et Parc Jean-Paul II. L'école Ferrandi, école française de gastronomie, et un hôtel 5 étoiles doivent s'installer dans une partie de la propriété - une ensemble qui portera le nom de… "Domaine de la reine Margot".

- Le XIXe siècle voit se succéder : de grands noms - trois généraux d'Empire… Mortier, Menou et Berthier ; des combats meurtriers : les derniers jours de la bataille napoléonienne, après Waterloo ; la chute du Fort d'Issy tenu par les Communards, en 1871 ; et l'implantation d'industries dans notre commune.

- Aujourd'hui, la ville hyperconnectée est en pleine métamorphose : les usines ont fermé, les quartiers se transforment, des architectes stars ont pris possession de l'espace urbain ; les grandes écoles s'implantent. Mais il reste, heureusement, beaucoup de verdure et des coins reculés où l'on se croit encore à la campagne… comme lorsque dans les année 1930 un chevrier passait régulièrement rue Hoche avec son troupeau !

Encore un grand merci à Pascale pour cette remontée du temps…Et à Bérengère, la directrice de la Résidence du Parc. PCB

12 mai 2017

Conférence - 16 mai 2017 - 9000 ans d'histoire d'Issy


Conférence 
Issy-les-Moulineaux, 9000 ans d’histoire 

Mardi 16 mai 2017, à 18 heures 

Résidence du Parc 
20 rue de l’Abbé Derry, Issy-les-Moulineaux 
Entrée libre 


Voici une nouvelle conférence organisée par Historim. Notre Historimienne Pascale va vous faire remonter le temps… pour un long voyage dans les siècles. 

Tout commence avec des hommes préhistoriques, des Gaulois, des Romains puis les Mérovingiens. Au cours des siècles suivants, des personnages célèbres y sont passés sans jamais se rencontrer : Marguerite de Valois et Louise Michel, Louis XIII et Farman, la princesse de Conti et Matisse.
Le village sur les hauteurs a dominé de riches propriétés. Il s’est transformé en ville industrielle avec Gévelot ou les Blanchisseries de Grenelle puis s’est métamorphosé en ville ultra-contemporaine, connectée, à l’aise dans le XXIe siècle. Des quartiers nouveaux ont surgi, de grands architectes, des étudiants sont venus ainsi que des entreprises grandes ou petites.

C’est aussi le lieu des premières fois : premier opéra en français, premier vol en circuit fermé, premiers réseaux intelligents conçus au CNET (du Minitel au GSM). 

Alors venez nombreux. On vous attend.

9 mai 2017

8 mai 2017 - Commémorations à Issy

Dépôt de gerbe au Monument du Maréchal de Lattre, en Centre Ville,
par  deux "anciens" de la Seconde Guerre mondiale,  Robert Dubot
et Robert Choffé,  tous deux dans leur  94e année. © A. Bétry

7 mai 1945, Reims… la Seconde guerre mondiale est terminée, la reddition de l'Allemagne est signée. Un grand jour commémoré dans toutes les communes françaises… le 8 mai ! Staline est furieux : il exige une nouvelle capitulation à Berlin, occupé par les Soviétiques. Dans la nuit du 8 au 9 mai, c'est chose faite. Le général de Lattre de Tassigny (il n'est pas encore maréchal) signe l'acte de capitulation pour la France.


Commémoration du 8 mai 2017, Square Bonaventure Leca, devant la plaque aux Veuves et Orphelins de guerre.
© A. Bétry

À Issy-les-Moulineaux, en ce 8 mai 2017, les écoliers étaient porte-drapeaux (ci-dessus). Une belle passation du souvenir entre les "anciens" et la jeune génération. PCB


Fanfare de la Police nationale, place de la Mairie. © A. Bétry









7 mai 2017

1973 : explosion à l'usine Gévelot. Suzy se souvient

Historim a consacré plusieurs articles à l'explosion de l'usine Gévelot, le 10 juillet 1973 : conférence, témoignages de pompiers, photos…  Voici le témoignage de Suzy, alors  infirmière à l’hôpital Corentin Celton. Aujourd'hui elle est  bénévole d’associations comme le CIB et membre du Conseil Communal des Aînés.

Suzy Pavan, ancienne infirmière.
Le 10 juillet 1973, elle était de garde et finissait son service à 23 heures. De retour chez elle un peu plus tard vers minuit d’après ses souvenirs (en réalité quelques minutes plus tard), elle entend une explosion provenant de l’entreprise de munitions Gévelot, rue Aristide Briand. 
Du coup, le 11 au petit matin, elle retourne à l’hôpital où il n’y avait pas « d’infirmière aux urgences ». D’autres membres du personnel revinrent aussi prêter main-forte car c’était « un champ de bataille ». Beaucoup de pompiers étaient blessés. Suzy utilisa un portemanteau, faute de mieux, pour soutenir les tubes de perfusion. Elle retira des visages de nombreux éclats de bois, prépara les victimes pour le bloc opératoire ou pour leur transfert vers d’autres hôpitaux. Elle se souvient « des membres écrasés » des blessés aux visages noircis par les fumées de l’incendie et qu’on n’avait pas eu le temps de nettoyer. Texte et photo P. Maestracci

Retrouvez sur le site 


2 mai 2017

Le port d'Issy-les-Moulineaux

Alors que depuis fin 2015, les travaux vont bon train pour l'aménagement des berges et du port d'Issy, voici ce qui avait été envisagé dans les siècles passés. Et nous l'avons échappé belle ! Certes, nous avons bien subi une grande crue en 1910 (et une petite en 2016) mais si le projet de créer une rade sur la plaine de Grenelle et jusqu’à nos portes avait vu le jour, le visage de notre ville aujourd’hui ne serait pas celui que nous connaissons.

Un canal de la Manche à Paris
En fait, cette idée de rade s’inscrivait dans un projet plus vaste datant du XVIIIe siècle, celui de rendre la Seine navigable aux grands vaisseaux par l'ouverture d'un canal qui irait de la Manche – au départ de Cherbourg – à Paris, bref, de créer un vrai port aux portes de Paris. Ce projet est d’abord présenté à Louis XVI, mais il est vivement combattu par les architectes, qui le regardent comme « capable d'entraîner la ruine de la capitale par la filtration de l'eau salée à travers le terrain calcaire qui sert de base à Paris ».
Dans son  Tableau de Paris, publié en 1781 (1000 chapitres en 12 volumes !), un certain Louis Sébastien Mercier revient à plusieurs reprises sur le projet, qu’il fait partir cette fois de Dieppe.

Des projets fous sous Napoléon
Lucien Lambeau, dans son Histoire des Communes annexées à Paris en 1859 (ci-contre) écrit : « A diverses reprises, on tenta d’utiliser la plaine de Grenelle. Naudy Perronnet soumit à Napoléon 1er un projet pour transformer la plaine en une rade - ou naumachie - pour la manœuvre de navires destinés aux élèves d’une école polytechnique à créer ». Cette proposition, qui aurait pour effet d’inonder la plaine de Grenelle et le bas d’Issy (voir ci-dessous le plan dessiné par Girardet et lithographié par Joumatz) s’inscrit dans un autre projet d’urbanisme, qui lui non plus ne verra jamais le jour, celui d’une « cité Impériale » bâtie sur la colline de Chaillot.


Le comte de Las Cases, dans le tome IV du Mémorial de Sainte-Hélène, s’attribue l’idée, écrivant « qu'il présenta à Napoléon, en 1811, un plan pour transformer le Champ de Mars en une naumachie qui eût servi d'ornement au Palais du roi de Rome, et qu'on aurait creusée suffisamment pour recevoir de petites corvettes destinées à l'instruction d'une école de marine installée à l'École militaire » (tableau ci-dessous).


Mais Naudy Perronnet revendique l’idée dans un ouvrage publié en 1825, précisant l'avoir proposée lui-même à l’empereur en 1812, avec cette seule différence qu'il établissait sa rade ou son bassin dans les plaines de Grenelle, de Vaugirard et d’Issy. Napoléon aurait répondu : « L’idée est bonne et l’intention excellente, mais il faut que cela passe par les mains de maîtres expérimentés ». Une belle façon d’enterrer le projet.

Paris, port de mer
En 1825, sous l’impulsion du baron Charles Dupin, polytechnicien et ingénieur naval, une brochure intitulée Paris port de mer a pour but de démontrer, à nouveau, l’intérêt du projet, s’agissant cette fois d’un canal destiné à permettre à des navires de 800 tonneaux de rejoindre Paris.

En 1865, sans doute portée par le percement du canal de Suez, l’idée d’un tel chantier ressurgit à la parution d’un livre de Victor Fournel écrivain, journaliste et historien, intitulé Paris nouveau et Paris futur (ci-contre). Sans doute excellent historien – aujourd’hui oublié - mais moins habile pour prédire l’avenir, il écrit : « Ce projet, qui pouvait jadis paraître une utopie, est tombé aujourd'hui dans le domaine des gens pratiques, et il est probable qu'il ne se passera pas bien longtemps avant qu'il s'exécute. »

Mais déjà fin XIXe, il est évident qu’un tel projet d’urbanisme n’est plus réalisable sur les plaines de Grenelle, de Vaugirard et d’Issy, accueillant désormais de nombreuses entreprises, des logements, une usine électrique et la voie ferrée Paris-Versailles. Toutefois, l’idée d’un port à l’ouest de Paris sera reprise après la Première guerre mondiale, pour être implanté cette fois à Gennevilliers, dans une zone encore très agricole.

Ouf !
Si le projet de Mercier avait vu le jour à Issy fin XVIIIe, inondant la plaine entre la Seine et l’axe actuel Renan-Leclerc-Cresson, l’histoire de la ville en eût été changée : pas de passé industriel (l’usine Gévelot, la Blanchisserie de Grenelle, la biscuiterie Guillout, Ripolin, les usines d’aviation…et les sièges sociaux d’aujourd’hui), la ligne de chemin de fer Paris-Versailles devant trouver un autre chemin, le périphérique construit sur pilotis, et, surtout, l’histoire de l’aviation française ne prenant pas son envol à Issy ! Jacques Primault