4 mars 2021

Rousseau et Bourbon-Conti… échec et mat !

 Couvre-feu, confinement,  musées, cinémas, salles de concert et restaurants fermés… la période idéale pour découvrir, ou redécouvrir, les échecs, apparus vers le VIe siècle en Inde. Un jeu que l'illustre Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) appréciait et qu'il partageait avec un certain Louis-François de Bourbon-Conti (1717-1776), le petit-fils du Grand Conti, le propriétaire du château d'Issy !

Louis-François de Bourbon-Conti
© BNF

Jean-Jacques. Rousseau.
© XDR












C'est dans les Confessions, son autobiographie rédigée entre 1765 et 1770,  qui couvre les 53 premières années de sa vie, que l'on découvre cette attirance au jeu d'échecs. Roi, tour, dame, pion, cavalier, fou… rien ne résiste au talentueux Jean-Jacques Rousseau, qui se plonge dans le traité d'échecs (ci-dessous), rédigé par Gioachino Greco (vers 1600-1634), dit Le Calabrais, considéré comme le meilleur joueur d'échecs du XVIIe siècle.



« J'achète un échiquier, j'achète le Calabrois : je m'enferme dans ma chambre, j'y passe les jours et les nuits à vouloir apprendre par cœur toutes les parties, à les fourrer dans ma tête bon gré, mal gré, à jouer sans relâche et sans fin. Après deux ou trois mois de ce beau travail et d'efforts inimaginables, je vais au café, maigre, jaune et presque hébété ». Et voilà Jean-Jacques Rousseau devenu « forcené des échecs », comme il l'écrit lui-même !  



Que ce soit à Paris, au café de la Régence, ou dans son logis du Petit Mont-Louis (ci-dessous), à Montmorency, qu'il habite de 1757 à 1762, Jean-Jacques Rousseau joue. Et c'est ainsi qu'il nous laisse un souvenir mémorable d'une de ses parties avec le petit-fils du Grand Conti. Jugez par vous même.

« Comme mon appartement de Mont-Louis était très petit, et que la situation du donjon était charmante, j'y conduisis le prince qui, pour comble de grâces, voulut que j'eusse l'honneur de faire sa partie aux échecs. Je savais qu'il gagnait le chevalier de Lorenzy [dont le prince était l'élève], qui était plus fort que moi. Cependant, malgré les signes et les grimaces du chevalier et des assistants, que je ne fis pas semblant de voir, je gagnai les deux parties que nous jouâmes. En finissant, je lui dis d'un ton respectueux, mais grave : "Monseigneur, j'honore trop Votre Altesse sérénissime pour ne la pas gagner toujours aux échecs". Ce grand prince, plein d'esprit et de lumière, et si digne de n'être pas adulé, sentit en effet, du moins je le pense, qu'il n'y avait là que moi qui le traitasse en homme, et j'ai tout lieu de croire qu'il m'en a vraiment eu bon gré ».

Alors, bonne partie… ou bonne lecture des Confessions ! PCB

Jeu d'échecs en bois. © XDR

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