8 novembre 2023

Jean Ors - constructeur de parachutes à Issy-les-Moulineaux

Jean Ors vers 1920. 

Nous avons déjà évoqué ce parachutiste, inventeur-entrepreneur, installé avant-guerre à Issy (ci-contre). Nous complétons ce premier article (http://www.historim.fr/2013/12/jean-ors-un-parachutier-isseen.html), en présentant le volet de l'entrepreneur isséen, après réception de nouveaux documents transmis par un parent, le général de Launet, que nous remercions. 

Du pilote au parachutiste

En 1911, à l’âge de 35 ans, il obtient son brevet de pilote - n° 382 - à l’école Blériot de Pau. Après quelques exhibitions en province, il se consacre à la question du parachute, qui va devenir l’œuvre de sa vie, peut-être née de son souci de diminuer le grand nombre de décès accidentels d’aviateurs grâce à une « bouée aérienne ».

En 1913, il crée son premier parachute, d’un diamètre de 9 mètres, constitué de 32 faisceaux de soie japonaise naturelle. Par souci de sécurité, il positionne au centre de son système un empilement de cerceaux formant ainsi une sorte de cheminée où l’air s’engouffre et déploie rapidement la toile, évitant au surplus l’emmêlement des suspentes.
Il teste à plusieurs reprises son invention avec des mannequins, qu’il jette ainsi équipés d’une plate-forme de la Tour Eiffel (ci-dessous). Ses tests sont tous concluants mais il souhaite prouver la qualité du système en l’expérimentant lui-même.

Le système Ors, au pied de la Tour Eiffel.

Cet essai en « réel » se déroule à Juvisy le 12 février 1914 et s’avère très concluant. Il dépose un brevet en juin mais la guerre l’oblige à interrompre ses expériences. Son statut durant le conflit reste un mystère. Si la presse d’après-guerre le présente comme ayant été lieutenant aviateur, les archives de la Gironde indiquent un passé de hussard, sans mention d’aviateur, puis sa réforme le 30 août 1914, confirmée en juin 1915.


On retrouve Jean Ors après l’armistice en partance pour les États-Unis afin de faire la propagande de son modèle. Sautant en parachute à plusieurs reprises près de New York, il obtient le grand Prix du concours international d’Atlantic City et le Prix L. Bennett. 
De retour en France, il reçoit également en 1920 et 1925 plusieurs Prix en Belgique. Avec déjà dix-sept sauts à son actif et axant délibérément sa propagande sur les sauts de meeting, il voit peu à peu son parachute adopté par beaucoup de parachutistes d’exhibition. Mais son objectif principal reste la sécurité des aviateurs eux-mêmes, qui progresse trop lentement à son goût.

L’entrepreneur

Plan cadastral du 9 rue Kléber, à Issy.
Demeurant 27 rue de Chambéry à  Paris, dans le 15e arrondissement, jusqu’au début des années 20, il recherche un atelier, qu’il trouve à Issy-les-Moulineaux au 9, rue Kléber (téléphone : 192), où il s’installe avec son épouse Marie Couvert, pour confectionner ses prototypes puis lancer la future production (ci-contre).

La surface totale est de moins de 1 000 m2, se répartissant entre l’habitation et les bureaux, donnant sur rue et aujourd’hui disparus, et, plus en arrière, un grand atelier sous hangar, dont il reste une façade intégrée dans une restructuration réalisée en 2003. Ces photos anciennes (ci-dessous) en sont un témoignage.

9 rue Kléber, Issy. A g. habitation, bureaux et à l'arrière l'atelier. A dr. les travaux de 2003.

En 1922, Jean Ors propose le parachute-siège avec système d’ouverture automatique et pliage dans un sac - d’abord rond (ci-dessous) puis rectangulaire - permettant aux pilotes et aux passagers d’un avion de s’asseoir sur l’équipement. Il est testé avec succès à Toulouse par le Tchécoslovaque Stanka et remporte plusieurs fois le premier prix des concours Nieuport-Astra.


À l’issue du concours officiel de 1924 du service technique de l’aéronautique (dont le laboratoire de test se situe à Issy-les-Moulineaux), trois parachutes Ors sont enfin homologués : sac dorsal rectangulaire, sac siège et sac rond (ci-dessous). 

Parachutes Ors, 1922-1924.

Concours de circonstance, en janvier 1925, le pilote Henri Pitot doit la vie sauve à son parachute Ors lors d’un vol d’essai d’un nouvel avion, comme on peut le lire dans Les Ailes du 8 janvier 1925.

Mais, en 1925, au moment où le ministère des Armées lance enfin ses premières commandes de parachutes pour les aviateurs, Jean Ors voit sa santé décliner. Il décède le 4 février 1926, à l’âge de 50 ans, à Issy-les-Moulineaux, faisant l’objet d’articles très élogieux dans la presse aéronautique (Les Ailes, L’aéronautique).

Après sa mort, sa veuve poursuit l’activité commerciale naissante, apparaissant dans les publicités sous la dénomination de « veuve Jean Ors, constructeur ». Désormais, il y a bien la mention tant espérée : « Fourni actuellement aux Forces aériennes » (ci-dessus et ci-dessous). 
Au début des années 30, sa veuve quitte Issy-les-Moulineaux pour Bordeaux, sans que l’on sache à quelle date l’atelier cesse ses activités.                  Jacques Primault.


Rendez-vous sur le site le 12 novembre, 18 h, pour découvrir les exploits d'une jeune parachutiste, Denyse Collin, équipée d'un Ors, sautant sur le terrain  d'Issy-les-Moulineaux.

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