8 novembre 2019

L'après Grande Guerre à Issy - épisode 2 - Un nouvel élan industriel

Transformations urbaines, comme on l'a vu, mais aussi accroissement et diversité du potentiel industriel touchent Issy-les-Moulineaux au lendemain de la guerre.


La blanchisserie de Grenelle.

La fin du paysage rural
Après la guerre, les mutations amorcées à Issy-les-Moulineaux depuis près d’un siècle se poursuivent sur un rythme plus soutenu et entament de plus en plus fortement le paysage rural : les derniers espaces agricoles cèdent progressivement devant les lotissements, l’extension du réseau routier et l’industrialisation galopante. Depuis des décennies déjà, les vignerons ont quasi disparu des coteaux. Les maraîchers, eux, continuent à cultiver la plaine, même si elle est fréquemment dévastée par des inondations. Chassés par les militaires du champ de manœuvres, ils se sont déplacés vers l’ouest, du côté du hameau des Moulineaux (où survivra jusqu’au mitan du siècle une étable, évocation tardive de l’ancienne Ferme des Chartreux).

L'industrialisation se généralise
Froide réalité ! La guerre a assuré un accroissement durable du potentiel industriel de la commune - plus encore peut-être que dans le reste de l’agglomération parisienne. Grands fournisseurs de l’Armée en effet, les secteurs de la fabrication de matériel militaire (munitions comprises) et de la construction aéronautique, voire de la métallurgie lourde sont largement représentés dans la plaine isséenne. Or ils ont connu entre 1914 et 1918 un vigoureux développement et leur vitalité a elle-même entraîné dans son sillage la création de quantités de sous-traitants.

Vue de l'usine S.E.V. à Issy.
Pour ces sociétés, les années suivantes 1918- 20 sont d’abord celles des tentatives de reconversion, plus ou moins pertinentes et réussies, celles aussi du regroupement et de la concentration des activités. La crise n’est pas loin … ; mais elle ne sera que passagère. Les entreprises continuent à se développer : elles s’agrandissent, acquièrent une ou plusieurs parcelles voisines et se dotent de bâtiments d’ateliers et de bureaux modernes. C’est le cas de la Compagnie des Lampes (à l’angle des rues Rouget de l’Isle et Camille Desmoulins), et de sa voisine, les Fabriques de Produits de Chimie organique de Laire, ainsi que de la Blanchisserie de Grenelle (photo en haut), cédée à la firme Fontex et transformée en société anonyme dès 1917, ou encore de la « S. A. pour l’équipement électrique des véhicules » (plus tard S.E.V. Marchal, ci-dessus), qui transfère son siège social rue Guynemer à Issy, où elle s’est implantée en 1913 et où elle ajoute un troisième bâtiment, haut de plusieurs étages, aux deux qui existent déjà. 

Plan du projet de la Brasserie des Moulineaux, 17 juillet1 1919.
Quant à la Brasserie des Moulineaux, la production en croissance constante amène la société à faire dresser en 1919 un projet (plan ci-contre) pour une nouvelle unité de fabrication complète sur un vaste terrain encore inoccupé ; mais le projet n’aboutira pas.  
Seule dans cet ensemble, la Manufacture de Tabacs fait exception. La production, en hausse constante depuis l’ouverture de l’établissement, continue à augmenter dans de fortes proportions entre 1914 et 1917. Mais curieusement après la guerre, le mouvement s’inverse et, entre 1921 et 1929, la production annuelle diminue considérablement (de moitié ?) ! (ci-dessous).

Façade principale de la Manufacture de Tabacs.
Gros plan sur la Société Française de Munitions (ex-Gévelot)
D’autres exemples, extraits de diverses branches, pourraient être cités. Mais une usine mérite évidemment d’être plus spécialement et longuement mentionnée : la Société Française de Munitions (ex-Gévelot). Elle atteint son apogée à la fin de la guerre et saura s’y maintenir jusque vers 1955. A l’approche des hostilités, les états-majors des différents pays s’étaient en effet porté acquéreurs de quantités de munitions toujours plus importantes. L’activité s’était parallèlement intensifiée : le chargement journalier des cartouches pour pistolets automatiques était ainsi passé de 60 000 unités en avril 1916 à 175 000 en septembre 1917. 


Atelier de chasse de l'usine Gévelot.

L’usine s’agrandit en conséquence et, continuant sur sa lancée, prend peu à peu sa physionomie définitive. Elle se modernise aussi : une partie de l’électricité lui est désormais fournie par la Compagnie de l’Ouest-Lumière via des « canalisations aériennes ». En 1919, les modifications qui s’imposaient, sont mises en œuvre, et en particulier un réaménagement et une réinstallation des poudrières, avec une diminution du stock de poudre noire particulièrement dangereuse pour les alentours. L’établissement ne quittera définitivement Issy-les-Moulineaux qu’en 1992 (ci-dessus).
Florian Goutagneux.

A suivre - Épisode 3, le 14 novembre, 18 h.


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