26 mai 2014

23 mai 1910 : accident de train aux Moulineaux


Le Petit Journal du 24 mai 1910 relate un accident de train qui s'est produit sur notre commune à la gare de Moulineaux-Billancourt, la veille au soir. Avec tous les détails.

Photo de l'accident. © Le Petit Journal

"Un grave accident de chemin de fer s'est produit hier soir, à sept heures et demie, sur le chemin de fer de l'Ouest-État, près de la gare de Moulineaux-Billancourt. Un train de voyageurs venant des Invalides et se dirigeant sur Suresnes-Longchamp a déraillé. La locomotive et le fourgon de tête ont culbuté. Le mécanicien et le chauffeur ont été tués. Le conducteur du train a été blessé, mais peu grièvement. Quant aux voyageurs, ils en ont été quittes pour la peur, sauf deux d'entre eux, qui ont reçu des contusions diverses.

"Voici les renseignements que nous avons pu recueillir sur place, l'enquête officielle, à peine ouverte, n'ayant encore rien appris quant aux causes techniques de cet accident. Le train 282, qui est, pour la presque totalité, un train d'employés ou d'ouvriers de l'administration habitant en banlieue, quitte la gare des Invalides vers sept heures. Direct entre la station du Champ-de-Mars et celle de Bellevue, ce train brûle la station de Moulineaux-Billancourt, devant laquelle il passe à 7 heures 14.

La gare des Moulineaux au début du XXe siècle. © XDR

"Le train marchait par conséquent à bonne vitesse, environ 60 kilomètres à l'heure, lorsqu'en arrivant à la hauteur des signaux 20 et 20 bis, à 400 mètres de la station de Moulineaux-Billancourt et, devant la gare des marchandises, le train dérailla. L'attelage s'étant rompu entre la locomotive et le fourgon d'une part, et les wagons d'autre part, la machine et le fourgon, emportés par la vitesse acquise, continuèrent leur route pendant une soixantaine de mètres, au bout desquels ils culbutèrent. La locomotive, en effet, rencontra un cœur c'est-à-dire un embranchement, qui forma aux roues restées sur le-rail un obstacle qui lui fit faire un véritable panache.

"La locomotive rebondit sur une voie de garage voisine de celle qu'elle suivait, où elle vint s'abattre. D'après l'état dans lequel elle a été retrouvée (photo ci-dessus), la locomotive a dû faire un demi-tour sur elle-même, se dresser sur son avant et venir tomber sur l'autre coté. Le fourgon, qui s'était détaché à son tour et était resté sur la voie normale, s'est couché sur le côté gauche. Le personnel de la gare qui se trouvait sur le quai entendit, s'il ne le vit pas, l'accident. Un bruit formidable retentit au moment de la chute et donna l'alarme à tout le monde. La vapeur s'étant renversée, on vit de furieux jets de vapeur s'élancer en l'air en même temps que des gerbes de flammes fusaient du foyer répandu à terre.

"Les employés de la gare, bientôt aidés des soldats de la 22e section des commis-ouvriers et d'un détachement du génie appartenant au secteur électrique des Moulineaux, organisèrent les secours. On se précipita vers la locomotive. Le choc avait projeté le mécanicien de sa machine à terre. Le front était balafré d'une large blessure que le malheureux s'était faite en tombant contre on ne sait quel obstacle. Il agonisait et le corps encore secoué de spasmes ne bougea bientôt plus. Quant au chauffeur, resté sur la machine, enfermé par le garde-fou du cendrier, il était mort quand on arriva, échaudé par la vapeur. En outre, le malheureux avait le côté droit du cou sectionnné par une horrible et profonde entaille et il fallut, en le dégageant, prendre des précautions pour protéger la tête.

La Gare des Moulineaux et la correspondance avec les tramways. 
"Le mécanicien Morlot appartenait au dépôt des Batignolles. Le chauffeur Georges Lemonnier, âgé de 28 ans, demeurant 173, avenue de Clichy, laisse une veuve et un enfant. Il y a eu, nous l'avons dit, plusieurs blessés. Ce sont : M. Charrier, chef de train, blessures à la figure. MM. Brasset, voyageur, demeurant 161, Grande-Rue, à Sèvres, et Gihiel, demeurant rue Royale, à Saint-Cloud, atteints légèrement. Ils ont pu regagner leur domicile. Les cadavres du chauffeur et du mécanicien ont été déposés momentanément à la gare de Moulineaux-Billancourt. Ils seront transportés aujourd'hui à leur domicile.

"Vers onze heures et demie du soir seulement, Mme Lemonnier, femme du chauffeur, est venue reconnaître le corps de son mari, sur lequel la malheureuse veuve s'est jetée en pleurant. Dans la soirée se sont transportés sur les lieux MM. Rousseau, directeur des chemins de fer au ministère des Travaux publics ; Cloutet, directeur de l'exploitation aux chemins de fer de l'État ; Boudet, ingénieur en chef de la traction, qui ont, avec M. Souliard, commissaire de police de Vanves, ouvert une enquête sut les causes de l'accident. Ces causes n'ont, jusqu'à présent, pas pu être établies."

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