1 novembre 2013

Issy-les-Moulineaux, au carrefour des eaux de source

Issy-les-Moulineaux se trouve au centre du Bassin Parisien qui est formé de roches sédimentaires. Certaines sont perméables, tel le calcaire des coteaux ou le sable doré dont le nom se retrouvait rue des Sablons (rue Hoche).  D‘autres en revanche sont imperméables comme la terre glaise qui était extraite à l’emplacement du Parc des Expositions pour la transformer en tuiles et briques dites de Vaugirard. Elle a donné son nom à la rue de la Glaisière (rue Minard depuis 1890). Enfin, les eaux profondes peuvent jaillir de puits artésiens comme celui percé au XXe siècle rue Rouget de Lisle. à l’origine des Blanchisseries de Grenelle.

© Alain Bétry
Bassin du parc Henri Barbusse alimenté par une source, vestige du parc du château des Conti. © A. Bétry
Lorsqu’une couche argileuse affleure à flanc de coteau, l’eau suinte ou donne naissance à une source. C’est la raison pour laquelle le village d’Issy s’est tout d’abord installé sur la hauteur à l’origine de la paroisse Saint-Étienne avec de l’eau disponible et un lavoir communal. Mais il y avait bien d’autres sources : Place de la Source (J.-F. Kennedy) ou dans le parc du château des Conti (ci-dessus).
D’autres au jaillissement plus imprévisible se déplaçaient le long de l’avenue de la Paix ou au-dessus de l’avenue de Verdun, non loin du Chemin des Vignes. Cette eau abondante explique également pourquoi, surtout au XVIIIe siècle, de belles propriétés s’installèrent en contrebas du village de part et d’autre de la route entre Paris et Versailles ; pas un parc digne de ce nom sans bassin, fontaine ou vivier (rue du Vivier future rue Guynemer).


coll. Robert Jacques
Fontaine au dauphin place de la Fontaine. 
Architecte Delaire, en 1910. 
(coll.Robert Jacques)
Des cartes anciennes permettent de distinguer le tracé de deux ruisseaux traversant le territoire isséen à ciel ouvert. Le premier, venu des bois de Meudon, descend du Val Fleury vers la Seine et actionne des moulins à eau, d’où le nom de Moulineaux. Le second ruisseau, au tracé plus long, appelé Ru de Vanves, prend sa source dans les bois de Clamart passe à Vanves par le parc Pic, puis alimente un abreuvoir aujourd’hui disparu. Il infléchit ensuite son parcours pour traverser le parc du château (lycée Michelet) avant d’arriver à Issy.

En septembre 1787, son propriétaire, le prince de Condé autorise les Isséens à utiliser le trop-plein des eaux de son parc. L’autorisation de ce prélèvement est renouvelée en messidor an III (juillet 1795) par les Domaines qui gèrent ce domaine confisqué à la Révolution. Un tuyau en détourne l’eau pour alimenter en droite ligne la fontaine de la Place de la Fontaine au croisement des rues de Vanves, Minard et du Général Leclerc (carte postale à gauche). Le ruisseau continue vers la Seine : il passe par le Rond-Point du Petit Abreuvoir (Rond-Point Victor Hugo) près des communs du château de la Reine Margot puis par le Rond-Point de l’Abreuvoir (Rond-Point du Président Robert Schuman). Le chemin de l’Abreuvoir est devenu la rue Rouget de Lisle.

Des travaux de canalisation souterraine ont été entrepris dès le XIXe siècle, faisant parfois naître des légendes de souterrains mystérieux remontant quasiment au Moyen-Age ! En 1867, un réseau de distribution d’eau est accordé pour 50 ans par la commune à la Compagnie générale des Eaux. Il y a trois chambres de répartition des eaux sous le parvis de l’église Saint-Étienne, sous l’avenue Jean-Jaurès et sous la rue Auguste Gervais près du Passage Saint Jean. Les tarifs sont de 70 francs/an pour une distribution journalière de 250 litres. De plus, la commune reçoit gratuitement 8000 litres/jour pendant 6 mois de l’année pour le nettoyage des rues, 250 litres pour la mairie (Place Vaillant-Couturier jusqu’en 1895) et 1000 litres pour les écoles.

© Alain Bétry
Passage Prudent Jassedé. Cette fontaine de B. Baque (1991) se situe à
l’emplacement d’une plus ancienne. © A. Bétry
En 1893, les eaux de source près du Fort sont regroupées dans des « cuvettes de distribution » pour deux fontaines publiques. Un réservoir est construit rue d’Alembert. En 1902, il y avait encore deux fontaines publiques : celle des des Marronniers (place du 11 Novembre) et celle des Noyers (à l’intersection de l’avenue Jean-Jaurès et du passage Jassedé, photo ci-dessus. La disposition est en gradins avec des ruisselets alimentant un bassin circulaire, en partie encadré par quelques colonnes et arcades d’un portique en béton évoque un style classique). Il s’agit d’une copropriété entre la commune pour un tiers, un peu plus d’un tiers pour le Séminaire et Saint-Nicolas et le reste pour deux particuliers MM. Naud et Bégule. A ce titre, ils se partagent les frais de rénovation de la fontaine des Marronniers. Il y a alors 32 bornes-fontaines et 25 bouches d’eau dans la commune, encore loin des structures et des services du SEDIF (Syndicat des Eaux d'Ile-de-France) actuel ! P. Maestracci



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