13 juin 2025

Léon Blum 1872-1950

Le quartier Léon Blum de notre ville est destiné à une exceptionnelle transformation, mais au fait qui était ce personnage ?

Léon Blum, homme d’état avait un frère cadet, René mort en septembre 1942 à Auschwitz. Journaliste il eut une carrière littéraire et théâtrale. En 1940, il se replie à Hendaye ; pour lui comme pour son frère, quitter la France paraît une désertion. 

Au lieu de rejoindre New York où se produit sa troupe, il rejoint Paris, est arrêté le 12 décembre 1941 lors des premières rafles antijuivesS’ensuit une liste d’étapes en France : Compiègne, Pithiviers et Drancy pour s’achever à Birkenau où sa vie prend fin.

La même année 1940, son frère Léon, homme politique, est arrêté et emprisonné sur ordre de Vichy, livré aux nazis par Pierre Laval puis déporté à Buchenwald en avril 1943. Ayant survécu aux camps, Léon Blum revient en France à la libération en 1945.
 





Pour l’Histoire, Léon Blum semble avoir laissé une trace indélébile.

René Coty qui deviendra plus tard président de la République, déclara : « Moi qui fus le plus souvent du camp opposé, je l’ai profondément admiré, lui qui fut toute confiance, toute conscience, toute noblesse… »
« Dès qu’il est apparu à la tribune, nous avons tout de suite reconnu en lui le successeur de Jaurès… »

Mais cet homme soit-disant successeur de Jaurès, qui est-il
 ? 
En 1895, il commence une carrière de 25 ans au Conseil d’Etat. En 1902, il adhère au Parti socialiste français de Jean Jaurès et participe à partir de 1904 à la création de 
« l’Humanité ». Auprès de Marcel Sembat, ministre socialiste des travaux publics, il est son chef de cabinet de 1914 à 1917.
Léon Blum, devient un dirigeant de la Section française de l’Internationale ouvrière (SFIO) lors du congrès d’Issy-les-Moulineaux en 1969. A partir de cette date, il devient le Parti socialiste avec l’Union des clubs pour le renouveau de la gauche.
Des accords électoraux avec les communistes et la SFIO permettent le succès du Front Populaire en 1936. Grèves puis négociations et grève générale s’amorcent. Léon Blum est en première ligne. Cette situation alarmante amène à de grandes avancées sociales, telles que : les congés payés, la semaine de 40 heures, les conventions collectives. Léon Blum est alors victime de violents attaques antisémites.

De violentes procédures judiciaires se mettent en place et en 1942 se déroule un procès (mise en accusation du régime de Vichy). Ce célèbre procès de Riom permet au régime de vichy d’organiser des arrestations comme des assassinats. C’est ainsi que notre Léon Blum est arrêté et livré à l’occupant nazi. Pour Georges Mandel, la vie s’arrête assassiné en forêt de Fontainebleau. 
A sa libération, Léon Blum en 1946-1947, reste le directeur politique du « Populaire » jusqu’à l’arrivée de la IVe République.
 
Citations de Léon Blum : 
« Toute société qui prétend assurer aux hommes la liberté, doit commencer par leur garantir l’existence. »
« Toute classe dirigeante qui ne peut maintenir sa cohésion qu’à condition de ne pas agir, qui ne peut durer qu’à condition de ne pas changer, est condamnée à disparaître. » 
« J’ai souvent pensé que la moralité consiste essentiellement en le courage de faire un choix »
« L’homme libre est celui qui n’a pas peur d’aller jusqu’au bout de sa pensée. »
A. Bétry

10 juin 2025

Macerata, Issy-les-Moulineaux, destins croisés

Distantes de 1300 km et jumelées depuis 1982, les deux villes d’Issy et de Macerata semblent s’être accomplies en résonnance l’une de l’autre. Elles ont été exposées aux mêmes soubresauts de l’Histoire, bien qu’à des époques ou de façon parfois un peu différentes … ce qui ne fait qu’accroître l’attrait de la comparaison.

Même origine romaine par exemple, mais non simultanée. L’Helvia Recina latine, l’ancêtre de Macerata, aurait été créée un ou deux siècles avant Jésus-Christ. Ce qui allait devenir Issy l’a été après la conquête de César, donc un peu plus tard. Pour les deux, la date précise semble s’être perdue. Et l’une et l’autre gardent la trace de leur passé romain : dans la pierre pour Macerata où subsistent quelques ruines, dans son plan pour Issy dont l’axe principal suit le tracé d’une importante voie romaine.

         Les restes romains d’Helvia Recina, future Macerata. 
A partir du Ve siècle et de la chute de l’empire, les deux tombent aux mains de barbares migrants, Francs ici, Goths là-bas. La mémoire des siècles suivants s’est largement effacée, mais on peut supposer que l’une et l’autre cités se sont resserrées autour de quelque forteresse protectrice en leur centre, peut-être entourées d’enceintes à certaines époques. Une différence, toutefois : Issy n’était qu’à un jet de pierre de ce qui deviendra bientôt Paris et le siège du pouvoir royal, alors que Macerata ne se situe dans le voisinage d’aucune agglomération comparable qui puisse la prendre sous son aile. On sait ainsi qu’Issy dépendait en partie de la puissante et riche abbaye de St-Germain-des-Prés à laquelle elle restait liée par cette décidément inusable voie romaine. On ignore ce qu’il en était pour Macerata.

Les choses deviennent plus claires après l’an mil. Les écarts aussi. Le royaume des Francs s’affirme. Issy y gravite dans l’orbite de seigneurs laïques ou religieux vassaux d’un roi. L’Italie émiettée voit au contraire émerger les communes dites « libres » : chacune se taille son pré carré autonome. Une victoire remportée sur une cité rivale permet à Macerata de s’en octroyer le droit en 1134. Elle le conservera pratiquement jusqu’à l’unification italienne, en tout cas nominalement.

Le XIIIe siècle est celui des Universités. L’Eglise perd le monopole de l’enseignement qu’on dirait aujourd’hui « supérieur », ce qui révolutionne le monde de la pensée. L’Université de Paris, dont les statuts sont approuvés en 1213, est la première au monde à en porter le nom. Son rayonnement s’étend à l’Issy toute proche (et dont les écoles supérieures actuelles sont, somme toute, un lointain héritage). Isolée, la commune autonome de Macerata doit en revanche créer la sienne. C’est chose faite en 1290. Plus de sept siècles après, elle reste l’une des plus grandes d’Italie, voire la première rapportée à la population de la ville.

Quatre ans plus tard, en 1294, se produit l’un des plus grands prodiges de l’histoire de la chrétienté. Des anges apportent de Nazareth la maison de la Vierge Marie qui menaçait ruine et la déposent intacte au lieu-dit de Lorette. C’est à quelques heures de marche de Macerata. Immédiatement, les foules arrivent, de Macerata puis de toute l’Europe. Le pèlerinage à Notre-Dame-de-Lorette devient le plus important du monde occidental. Trois siècles plus tard, un certain Jean-Jacques Olier malade des yeux s’y rend à son tour. Il y est miraculeusement guéri. Revenu bouleversé et riche d’une nouvelle vision cette fois spirituelle, il décide de se consacrer à la formation des prêtres. C’est le point de départ du séminaire de Saint-Sulpice bientôt installé au cœur d’Issy. Une réplique de l’oratoire de Lorette y rappelle le double miracle. Et à Macerata, le premier samedi de juin, s’ébranle toujours chaque année l’antique pèlerinage : 80 000 participants à la dernière édition …



Le pèlerinage à Notre-Dame-de-Lorette vers 1700 (dans « Les délices de l’Italie » d’Alexandre de Rogissart). Crédit Catawiki


En 1320 et signe de son importance croissante, le pape (français) Jean XXII fait de Macerata le siège d’un évêché. Elle l’est toujours, un honneur que ne recevra en revanche jamais Issy (dans une France qui, il est vrai, compte trois fois moins de diocèses que l’Italie).

La Renaissance apporte un âge d’or aux deux cités, mais à un siècle d’écart – comme dans les deux pays en général. 

Le XVIe siècle voit Macerata se couvrir de palais privés et publics, et ses institutions s’enrichir d’académies culturelles. Souvent attirés par la proximité de Lorette, les voyageurs étrangers la visitent, à commencer par Montaigne et Cervantès. Le siècle suivant, c’est au tour d’Issy de devenir lieu de villégiature ou d’habitation pour plusieurs grands personnages, de la reine Margot aux princes de Conti, et d’échanges savants à l’image des « entretiens d’Issy » qu’abrite le séminaire.

Le XVIIIe siècle s’achève sur le premier contact officiel de la France avec Macerata … sous la forme des invasions napoléoniennes. Elles n’y laisseront pas que des bons souvenirs. S’y illustre le général J. - Ch. Monnier qui, revenu dans nos terres, est aujourd’hui inhumé au cimetière Saint-Sulpice à Paris, sis rue de Vaugirard et donc sur cette même voie romaine déjà citée : comme le monde est petit ! Et en 1815, tandis que l’empereur voit à Waterloo ses derniers projets se consumer dans une bataille funeste qui s’achèvera dans les rues d’Issy, c’est à Tolentino près de Macerata que son beau-frère et roi de Naples Murat subit exactement le même sort.

 Mai 1815, la bataille de Tolentino près            
de Macerata (par Vincenzo Milizia). 

 


                


Quarante-cinq ans plus tard, une autre aventure bonapartiste et transalpine finira mieux. Napoléon III apporte en effet un soutien décisif à l’unification italienne. Et alors qu’il entre à Milan sous les vivats de la foule, Macerata se rallie avec enthousiasme à la nouvelle nation. L’empereur aura la main moins heureuse en France en 1870. Le désastre de Sedan y conduit droit aux deux sièges successifs et dévastateurs d’Issy, celui par les Prussiens, puis celui pire encore par les Versaillais cherchant à investir Paris.

Alors avantage Macerata ? Non, car la révolution industrielle va se charger de rétablir l’équilibre. Si la proximité d’Issy avec Paris lui permet d’en profiter pleinement, l’éloignement de Macerata de tout centre démographique ou ressource minière d’importance aboutit au résultat inverse. Notre ville apprend ainsi dès le début des années 1920 à gérer l’afflux de main d’œuvre étrangère. Macerata y sera aussi confrontée, mais soixante-dix ans plus tard, à la chute du communisme (notamment celui des Balkans tout proches).

Occupées par l’Allemagne pendant la guerre, à partir de 1940 pour Issy et de 1943 pour Macerata, les deux villes sont libérées mi-1944 à dix semaines d’écart. Plus pacifiquement, le pape Jean-Paul II honore en juin 1980 le séminaire d’Issy de sa visite. Celui de Macerata connaîtra le même honneur treize ans plus tard, pratiquement jour pour jour.

Quand elles s’associent en 1982, les deux villes ont pratiquement la même population, autour de 45 000 âmes. Depuis, celle d’Issy a crû de 50 % quand Macerata s’est tassée de 10 % : les perspectives d’emploi y restent très inférieures. Macerata s’étend pourtant sur une superficie vingt fois plus vaste qu’Issy. Mais cela ne doit pas tromper : comme leurs ancêtres médiévales et au contraire de la France, les communes italiennes intègrent terrains et hameaux du voisinage. Quand on fait abstraction des terres agricoles, les surfaces urbaines sont comparables. Et si depuis le jumelage notre ville a gardé son même maire, pas moins de huit édiles différents de toutes les couleurs se sont succédés au municipiode Macerata – il est vrai, dans un pays longtemps cité pour son chaos politique.

Macerata, Issy-les-Moulineaux et Weiden in der Oberpfalz en Allemagne constituent enfin un rare cas de jumelage tripartite. Alors à quand une histoire comparée des trois villes ?

 


 
 Macerata et ses environs immédiats. Au nord-est : Loreto (Lorette). Au sud-ouest : Tolentino.

 






Quelques sources :

RICCI Ettore, SERRA Luigi et CASTELLANI Giuseppe, Macerata, Enciclopedia Italiana Treccani, 1934.

Association Centro Studi Maceratesi Storici.

Revue La rucola – notizie di Macerata

Pierre Baland  28 mai 2025

8 juin 2025

l'Île Saint-Germain d'Issy

Visite "historimienne" 

Charles, Isséen depuis sa naissance, fait fort gentiment visiter le quartier où il a vécu pendant son enfance après la guerre.
Le parcours démarre sur le boulevard des Îles qui a remplacé une voie plus étroite et dont la chaussée pour les voitures était séparée par un mur du trottoir pour les piétons. À noter d’ailleurs que ce boulevard a été surélevé par rapport à la rue précédente.
Au début de l’avenue du Bas-Meudon, face à un grand ensemble de bureaux Seine Saint-Germain, Charles évoque un hôtel-restaurant tenu par des Maghrébins. De l’autre côté, un autre bâtiment a remplacé plusieurs commerces dont un café à l’angle.





Cette avenue a connu pas mal de changements sauf au 14 où une enseigne en céramique indique encore « Caves Saint-Germain ». 


Mais au 21, l’annexe de la grande boulangerie a disparu.
Dans l’allée d’Issy, se trouvait un dépôt de charbon pour les usines Renault.
Une salle de bal était au numéro 20, elle fut remplacée par une salle de boxe fermée depuis. Aux numéros 28-30, il n’y a plus l’épicerie Le Comptoir Français ni le verger tout près dans l’allée Maximilien Luce. En revanche il existe toujours un stade aux numéros 44 à 48. Le premier appartenait aux Apprentis d’Auteuil. Il était entouré d’un haut mur mais les enfants du quartier récupéraient les ballons passés par-dessus dans la rue ou dans la Seine. Les peupliers au bord de la Seine ont pratiquement tous disparu. En face du stade, un foyer abritait 200 à 300 travailleurs venus d’Afrique du Nord. Ils logeaient à 6 par chambre. Au 8, la mûrisserie de bananes a disparu.
La visite se poursuit vers le petit bras de la Seine et le début de la promenade Constant Pape à l’emplacement de l’îlot Chabanne rattaché à l’île par un comblement en deux temps après-guerre.


En 1963 l'île s'appelait île de Billancourt 
La rue Pierre Poli (ex-allée de Seine) était en terre battue et servait de terrain de jeux comme la place Chabanne.

Au fond de l’allée de Billancourt, une passerelle menait à l’îlot. Un cheval s’est noyé en tombant à l’eau. Il y avait une grande maison un temps fréquentée par des chiffonniers puis par des Portugais.

Au 29 de la rue, un immeuble de bureaux est l’œuvre du grand architecte Jean Nouvel. Il remplace une vaste propriété mais aussi cinq maisons modestes dont celle de la maman de Charles. Au 8, l’hôtel du Bon Accueil a également disparu.

Un grand merci à Charles dont les commentaires ont enchanté le groupe et merci aussi à Eliane, Françoise et Tatiana pour l’évocation de quelques souvenirs. 

Texte : P. Maestracci
Photos : Michel Julien

7 juin 2025

Centre musulman d'Issy-les-Moulineaux

En 2023, notre présidente, dans l’esprit de la main tendue, manifeste le désir de rencontrer les musulmans de notre cité. Son représentant, M. Karim Dahmane, réceptif à cette proposition demande un temps de patience car la communauté n’a pas à l’époque de lieu décent de rencontre. En 2024, une proposition de contact se présente, mais pour raison de santé, celle-ci ne peut aboutir. 

Puis, en ce temps de printemps, fin mai 2025, Karim, président du Centre musulman d’Issy-les-Moulineaux m’invite au lancement de l’exposition « Islam et environnement »
Opportunité donc de pouvoir faire connaissance...  
Accueil chaleureux de l’ensemble de la communauté, hommes et femmes : thé à la menthe selon la coutume. L’intérêt de l’ensemble des gens présents surprend. Le traitement de l’écologie, valeur universelle, est présentée sous forme de photos de nature, et d’animaux.
Un discours rassembleur de M. Thierry Lefèvre, premier maire adjoint, puis de Mme Tiphaine Bonnier, maire adjointe au Développement durable et à la Condition animale donnent le ton et prouvent le résultat d’une volonté réciproque de partenariat de cette rencontre, grâce au travail accompli au préalable. 
Sans faire de prosélytisme, une jeune femme universitaire évoque l’époque du prophète Mahomet né à la Mecque en 570, et la ville de Médine où il a vécu jusqu’en 635 date de sa mort ; préférant le climat de celle-ci pour sa végétation et son environnement plus agréable. Le thème de cet environnement et la préservation de la biodiversité, la végétalisation, sont une valeur commune et fort ancienne.


Le Centre musulman entretient avec soin son espace végétal, la présence d’un jardinier et même d’un apiculteur apporte aux lieux une plus-value certaine. Une salle de rencontre et de réunions a été aménagée avec beaucoup de soin pour la circonstance. Merci encore à Karim et sa communauté pour leur accueil, dans un esprit démocratique et de respect.

Quelques documents sur la nature à Issy-les-Moulineaux sont mis à la disposition du public ; un sachet de graines est même destiné à être semé.
A.Bétry

6 juin 2025

Nez en l'air 2

Réponse à la question du 2 juin dernier

Réponse : Hercule ou Héraklès

 

Hercule, de Jupiter et d’une mortelle Alcmène, est un héros de la mythologie gréco-romaine. Comme il est mortel, la déesse Junon jamouse veut le faire périr. A deux reprises, Hercule sort victorieux de deux combats contre des serpents. La première fois, il étouffe les deux envoyés par Junon. Devenu adulte, il doit accomplir douze travaux parmi lesquels il combat l’hydre de Lerne. Ce monstre a des têtes de serpent qui repoussent  quand on les coupe. Il les brûle donc. 

Cette sculpture de Jean Joachim qui date de 1959 se trouve sur le monument aux Morts sur l’esplanade de la Mairie. Les combats victorieux contre les ennemis et en particulier le nazisme sont ainsi symbolisés dans cette lutte d’Hercule contre un monstre. 

 

P. Maestracci


 

4 juin 2025

Isséens et Résistants morts pour la France

 Après la Seconde Guerre mondiale, la mémoire des Résistants a été perpétuée en attribuant leurs noms à des rues, une avenue, une place et un parvis. Cela se fit dès 1945.


La rue Pierre-Brossolette porte le nom de l’un des fondateurs du CNR (Conseil national de la Résistance). Pierre Brossolette est arrêté et torturé à Paris par la Gestapo en 1944 ; il parvient à se suicider pour ne pas parler.

Corentin Celton, agent hospitalier aux Petits-Ménages, est fusillé au Mont-Valérien en décembre 1943. Son nom est donné à l’hôpital dès 1945 comme à la station de métro proche puis au parvis devant l’hôpital.

Victor Cresson fut maire de la ville de 1935 à 1939. Il meurt en déportation au camp de Mauthausen en 1944. Son nom fut attribué à l’avenue où il résidait.

Plaque sur l’immeuble de Victor Cresson 
au numéro 33 de l’ancienne avenue de Verdun.

D’Estienne d’Orves, officier de marine, est fusillé en 1941 au Mont-Valérien.

Maurice Hartmann travaillait à la Manufacture des Tabacs. Il meurt en déportation en 1944. La rue qui porte son nom longe un des côtés de la Manufacture.

La place du Groupe-Manouchian rend hommage aux FTP-MOI (Francs-Tireurs et Partisans-Main-d’Œuvre immigrée). Le groupe de Missak Manouchian se réunissait dans un immeuble de la rue de la Défense. Ses membres furent exécutés au Mont-Valérien en 1944.

Une résistante, Simone Michel-Lévy travaillait dans l'administration des PTT (à l'emplacement de l'actuel Cœur de Ville). Résistante dans le réseau Action PTT, elle fut pendue en avril 1945. Son nom est attribué à une rue du quartier Val-de-Seine depuis 2021, près du siège social d'Orange.

                                                            Maison de Marcel Miquel 

Marcel Miquel, ancien conseiller municipal, fut déporté et mourut en 1943. Il habitait 48, rue de Bellevue qui a désormais changé de nom.

Gabriel Péri fut fusillé au Mont-Valérien en 1941.

Pierre Poli résidait sur l'île Saint-Germain. Il est tué en 1944 et son nom est donné à l'allée de la Seine. 

Rue Maurice-Hartmann derrière la Manufacture des Tabacs. Il ne reste qu'une ancienne grille des murs entourant la Manufacture. Des immeubles de bureaux ont été construits après la fermeture et la réhabilitation des anciens locaux.


Enfin, Jean-Pierre Timbaud fit partie des 50 otages, dont 27 communistes, arrêtés en 1940 et fusillés l’année suivante à Châteaubriant. Cette exécution fut exercée en représailles de l'attentat contre un officier allemand à Nantes.
 
Texte et photographies : P. Maestracci 

2 juin 2025

Nez en l'air 1


Quel est l'auteur et où se trouve cette sculpture ?

 réponse le 6 juin 2025 

29 mai 2025

Allées et noms isséens

  
Une allée est un passage bordé par des murs ou de la verdure, le plus souvent des arbres. Dans la ville, il existe environ une quarantaine d'allées dispersées dans tous les quartiers. Certaines ont le même nom que celui des rues sur lesquelles elles débouchent ou celui de bâtiments proches. Trois thèmes sont prépondérants pour les noms retenus.

Allée Jean-Nicot, proche logiquement de
la Manufacture des Tabacs.


Pour un tiers des noms, il s'agit de personnalités très variées, des hommes mais aussi de plus en plus de femmes. La plus ancienne est celle de sainte Lucie, martyrisée avec énucléation sous l'empereur romain Dioclétien. Treize siècles après, au XVIe siècle, Jean Nicot introduit le tabac en France, d’où le mot nicotine. Des officiers sont honorés comme Vauban sous Louis XIV, spécialiste des fortifications et dont l'allée longe le Fort d’Issy mais aussi Hoche, brillant général de la Révolution française. Il était contemporain d’Olympe de Gouges, féministe guillotinée à cette période-là.

Allée des Petits-Ménages, ancien nom de l’hôpital créé sous le Second Empire et qui change de nom en 1945. On aperçoit au fond la chapelle Saint-Sauveur.

D’autres noms honorent des personnalités de la fin du XIXe au XXe siècle comme les peintres Matisse résident isséen ou Maximilien Luce, des savants comme Pierre Curie ou l’ingénieur Gustave Eiffel. L’aviatrice Maryse Bastié battit plusieurs records du monde ; son allée est proche de l’héliport. Parmi des contemporains, il existe une allée Alfred Nakache, champion du monde de natation et résistant, l’allée du Père Popieliuszko tué par la police polonaise et béatifié et celle de la célèbre résistante, Lucie Aubrac.



Allée Gustave -Eiffel. En réalité, une rue avec des bureaux dans le quartier Val-de-Seine.



Le deuxième groupe de noms fait référence à des villes voisines comme Grenelle (Paris XVe), Fleury (lieu-dit de Meudon), Billancourt (Boulogne) ou à des bâtiments comme les Petits-Ménages.
Enfin, quelques noms d’allées concernent l’économie : le passé rural avec la Ferme, les maraîchers et l’industrie avec les Carrières ou la Brasserie.

                           


 Allée Lucie Aubrac dans le nouvel écoquartier du Fort 
avec les écoles récentes Justin Oudin sur la gauche et
 l’entrée du Fort à droite.




Texte et photographies : P. Maestracci  

27 mai 2025

Le fort d'Issy : visite de l'écoquartier

Le parcours commence devant le collège de la Paix, inauguré en 2021, rue du Fort. C’est près de l’entrée principale du Fort d’Issy, à l’emplacement de l’ancien fossé protégeant les murailles.


Les transformations du quartier se sont faites en trois étapes d’inégale longueur. Tout d’abord, du Moyen Âge à 1840, il n’y a qu’une zone cultivée avec des champs et des vignes au-dessus du village en contrebas.


De 1840 à 2012, cela devient une zone militarisée. Le fort de forme pentagonale est construit de 1840 à 1844, en complément des fortifications autour de Paris qui sont à un peu plus de deux kilomètres à vol d’oiseau. De violents combats s’y déroulent lors de la guerre contre la Prusse fin 1870 - janvier 1871. Le fort dirigé par le général Guichard est assiégé et bombardé avant l’évacuation quand la paix est signée. Pendant la Commune, ce sont les Fédérés qui s’emparent du fort et sont assiégés et bombardés par l’armée versaillaise jusqu’au 8 mars 1871. Une plaque commémorative se trouve sur la paroi intérieure de la muraille. Par la suite, il y a plusieurs structures militaires dans le Fort.

Jardin japonais d’Ichikawa
© photos Michel Julien

En 2012, un accord est signé par la commune pour transformer le fort en écoquartier mais avec un bastion réservé à la Gendarmerie. Sont alors construits des logements de forme angulaire pour les 4 bastions ou de forme arrondie pour les immeubles du centre. Des services, des commerces, des jardins et des vergers apparaissent progressivement. La promenade dans l’allée du Puits permet d’en saisir les différents aspects, y compris les éléments d’un écoquartier.
Les casemates à l’ouest sont réaménagées en salles de sports et de restauration. Un canon de 1870 a été conservé le long d’un mur.
Sur le rond-point à proximité, la sculpture du Merle moqueur de Christian Renonciat (2016) est faite de boulets récupérés lors des travaux. Le long de la promenade du Verger, la médiathèque du Temps des Cerises offre une multitude d’activités. Un peu plus loin, le bastion de la Gendarmerie domine l’allée avant d’arriver à la piscine Aquazena puis au superbe jardin japonais d’Ichikawa (ville jumelée) créé en 2016 et régulièrement entretenu selon les règles du jardinage japonais.
 P. Maestracci

  

23 mai 2025

Noms isséens et parvis

Deux places isséennes sont qualifiées de parvis. Ce mot, issu du latin paradisus  paradis, est le plus souvent utilisé pour la place devant le portail d’une église.

Le premier parvis ainsi nommé est celui de Corentin-Celton. Ce résistant qui travaillait à l’hôpital des Petits-Ménages fut exécuté par les Allemands pendant la guerre. En 1945, son nom est donné à l’hôpital, à la station de métro de la ligne 12 ainsi qu’au quartier. L’hôpital a été depuis totalement démoli et reconstruit ; son entrée autrefois rue Guynemer est dorénavant sur le parvis.
Celui-ci est limité sur 2 côtés par des ailes de l’hôpital séparées par un jardin et l’ancienne chapelle, un autre par un immeuble résidentiel et il est ouvert sur le boulevard Gambetta. Il est occupé trois fois par semaine par un marché de plein air ou d’autres manifestations comme Educap City, des concerts et même l’animation des Jeux Olympiques en 2024. 

Le parvis Jacques Chirac, entre la Médiathèque du Centre-Ville, le Conservatoire Niedermeyer et une résidence pour Seniors donne sur la rue du Gouverneur-Général-Éboué. Son nom est celui du Président de la République de 1995 à 2007, Jacques Chirac. Il exerça un septennat puis un quinquennat. Son parcours politique est complet du mandat de député de la Corrèze, celui de maire de Paris avant l’arrivée à l’Élysée. Monsieur André Santini, maire de la ville fut un membre de son gouvernement.
Le parvis est aménagé avec un passage et un petit parc.



Parvis Corentin Celton décoré pour les Jeux Olympiques de Paris en 2024. À l’angle du bâtiment à gauche se trouve la Maison médicale de Garde le soir et le week-end. Un parking pour les vélos est protégé par les arbres. Sous le parvis, il y a un passage souterrain entre les deux ailes de l’hôpital ainsi que des laboratoires.




Parvis Jacques Chirac avec vue sur la rue. La Médiathèque est sur la droite et jouxte un immeuble de bureaux.
 
Texte et photographies : P. Maestracci

19 mai 2025

Louis Niedermeyer

Louis Niedermeyer, né le 27 avril 1802 à Nyon en Suisse et mort le 15 mars 1861 à Paris, fut un compositeur et professeur de musique suisse.
Après avoir entrepris des études musicales à Vienne, il les poursuit en 1819-20 à Rome puis à Naples. De retour en Suisse, il donne des leçons de piano, compose des opéras et des mélodies (mises en musique de textes poétiques), telle « Le Lac » en 1825, inspiré par un poème de Lamartine. Niedermeyer s’installe à Paris en 1836 où il donne de nouveaux opéras… aux succés limités !
Lors de la révolution de 1848, il demande et obtient, avec l’appui du futur Napoléon III, la nationalité française afin de pouvoir exercer ses droits d’électeur au début de la Seconde République (régime républicain du 24 février 1848 jusqu’à la proclamation en 1852, de Napoléon III comme empereur) en 1849, Niedermeyer s’oriente vers la musique d’église.
Puis, faisant suite à l’institut royal de musique religieuse ouvert en 1818 par Alexandre Choron, il fonde en 1853 "l’Ecole de musique religieuse et classique" qui ouvre en octobre de la même année au 10, rue Neuve-Fontaine-Saint-Georges (aujourd’hui rue Fromentin dans le 9e). Elle fonctionne en internat. Niedermeyer et Camille Saint Saens y enseignent le piano. L’établissement, plus connu sous le nom d’Ecole Niedermeyer va successivement s’installer au passage des Beaux-Arts près de Pigalle, puis en 1896 à la Villa d’Auteuil (bd d’Auteuil). L’école peut s’enorgueillir d’instruire des musiciens comme Gabriel Fauré, Camille Saint Saens et André Messager.
A la mort de Louis Niedermeyer en 1861, l’école sera dirigée par son fils puis par son beau-fils Gustave Lefèvre en 1865.
En 1922-23, le bail de la Villa d’Auteuil venant à expiration, l’école acquiert une spacieuse demeure à Issy-les-Moulineaux : l’ancienne propriété du sénateur Gervais, au 2, rue de l’Egalité où elle subsistera jusqu’en 1930.

© A. Bétry
Le15 mars 1990, André Santini, député-maire d’Issy-les-Moulineaux, ancien ministre, en présence de Jacques Chailley, musicologue a procédé au baptême de l’Ecole nationale de musique en "Conservatoire Niedermeyer".
Denis Hussenot

14 mai 2025

Le CNET et l’âge d’or de l’espace

Depuis son site d’Issy, le CNET s’est impliqué très tôt dans les télécommunications spatiales, apportant même une contribution majeure à plusieurs grandes « premières ». Il n’y a pas lieu de s’étonner d’une implication en tant que telle, tant espace et télécom sont imbriqués. Nos télécommunications, celles de tous les jours, constituent – et de loin – la principale application de l’espace en nombre de satellites. Sans eux, nous n’aurions pas de mondovision, de téléphone sur longue distance, de GPS, ou d’internet accessible partout, ou pas au même prix. Et en retour, il n’y peut y avoir de tir spatial sans transmissions, en outre parfois sur de très longues distances. Le CNET se devait donc d’y jouer un rôle.
 
Mais à cela s’ajoute que l’âge héroïque de l’ère spatiale, 1958-1969, coïncide avec la présidence De Gaulle, du Conseil puis de la République. Présidence attachée, on s’en souvient, à la souveraineté nationale, notamment technologique. L’Etat a donc encouragé le CNET, son bras séculier pour le développement des télécommunications, à s’y engager sensiblement plus vite que chez nos voisins, à l’époque plus atlanticistes (Donald Trump n’avait pas encore été élu). Au CNET, c’est Pierre Marzin qui conduira cette politique, d’abord comme son remarquable directeur de 1954 à 1967, puis comme Directeur général des Télécommunications jusqu’en 1971.
Et en réalité, cet engagement commence même avant les débuts de l’ère spatiale.

Fusées-sondes
 
Dès la création du CNET en mai 1944 figure en effet parmi ses objectifs l’étude des transmissions hertziennes en haute atmosphère, donc au contact avec l’espace. Quelques années plus tard, il participe à la réalisation des transmissions des premières fusées françaises Véronique et Monica (des fusées-sondes, c.à.d. sans capacité orbitale) qui volent à partir de 1952 jusqu’à des altitudes de plusieurs centaines de kilomètres.
En 1957, fort de cette expérience et en l’absence d’un organisme central chargé de l’espace, le CNET est autorisé à lancer lui-même son propre programme de fusées-sondes pour ses recherches en haute atmosphère. Il y réalise les instrumentations embarquées, définit le cahier des charges des fusées (commandées à la société Sud-Aviation, devenue par la suite Aérospatiale puis Airbus), construit l’infrastructure mobile sol comprenant PC de tir / rampes de lancement / stations de localisation, de télémesure et d’enregistrement / antennes et autres groupes électrogènes, et supervise les tirs. Bref, le CNET est chargé d’y faire à peu près tout à l’exception du vecteur lui-même, la fusée, dont il définit les spécifications. 

Ce programme remarquable - aucun satellite n’existe encore - ne sera jamais conduit à son terme, en tout cas pas comme prévu, pour des raisons entièrement externes. Le lancement inattendu fin 1957 de Spoutnik et la course à l’espace qui s’en suit changent en effet soudain la donne. Revenu au pouvoir mi-1958 et constatant l’absence de toute stratégie française en la matière, le général De Gaulle crée dès janvier 1959 un Comité des Recherches Spatiales, ou CRS, chargé d’élaborer des propositions sur le rôle que pourrait y jouer la France. En 1959, le CNET est en fait le principal acteur spatial français, recevant à lui seul 40 % des budgets nationaux. Et en mars, il crée très logiquement son propre département spatial (appelé par la suite RSR ou Recherches Spatiales Radioélectriques) placé sous la houlette d’un polytechnicien, François du Castel. Il le dirigera vingt ans.

 Dans un premier temps, ces changements n’affectent pas le programme de fusées-sondes. Les matériels sont réalisés et une première campagne de tirs débute en 1961 au Centre d’Essai d’Engins Spéciaux (CIEES) d’Hammaguir en Algérie, là où étaient lancées précédemment les Véronique et Monica. Le CNET y lance cinq fusées-sondes et les premiers résultats remontent à Issy où ils sont analysés.
 
Fin 1961, De Gaulle annonce approuver les recommandations du CRS et le remplacer par une structure aux pouvoirs renforcés chargée de les appliquer et de fédérer l’effort spatial français. Ce sera le Centre National d’Etudes Spatiales ou CNES, en ordre de marche à partir de 1962. Dès lors, le passage de certaines prérogatives du CNET vers le CNES semble inévitable, et c’est ce qui se passera. La création du CNES s’accompagne en outre d’un programme prioritaire, celui du lanceur orbital Diamant. Les fusées-sondes du CNET passent au second plan.
 
Une nouvelle campagne de tirs est néanmoins conduite en 1962, cette fois au Centre d’Essai et Recherche d’Engins Spatiaux (CERES) de l’île du Levant, sur la Côte d’Azur. Quatre fusées sont lancées. Ce seront les dernières tirées sous responsabilité CNET.
 
Deux autres tirs sont encore réalisés en octobre 1964 à l’Ile du Levant, mais désormais par le CNES, puis deux derniers fin 1970 au centre d’essai de Biscarosse dans les Landes. Avec une majorité de tirs réussis, le programme peut être qualifié de succès. Mais bousculé par les événements, il aura été largement amputé ou réalisé sous d’autres égides. La France est entretemps devenue la troisième puissance spatiale au monde, et le CNES l’unique organe étatique en charge des vols spatiaux. Les fusées-sondes développées sur spécifications CNET seront les dernières de la sorte. Mais elles n’en connaîtront pas moins un beau succès auprès d’autres utilisateurs français et étrangers – mais désormais sous tutelle CNES ou Sud-Aviation …
 Le rôle du CNET comme responsable d’un projet spatial ne s’arrête toutefois pas là.
 
 Une « première » française …
 
En 1959, assommés par Spoutnik, les Etats-Unis serrent les rangs de leurs alliés. Ils leur proposent d’embarquer des instruments de leur conception à bord de leurs satellites. De Gaulle pense à juste titre que c’est un moyen d’aider la France à rattraper son retard. A sa demande, le CRS trouve un premier accord en 1961. Puis celui-ci évoluera deux ans plus tard en un projet de satellite français à lancer par une fusée américaine.
 
Ce satellite, FR1 ou « Fréquences Radio 1 », sera le premier développé sous responsabilité du CNES entretemps créé. C’est un satellite scientifique (Astérix, que doit lancer Diamant, n’est lui qu’un démonstrateur). Sa mission étant l’étude de la propagation des ondes électromagnétiques de basse fréquence dans la haute atmosphère, la réalisation de son instrumentation est confiée au CNET. Et pendant cette période de transition, la mise en œuvre se fera sous responsabilité conjointe CNET et CNES. 

FR1 est lancé en décembre 1965. La mission est un complet succès. Il fonctionne deux ans et demi, une remarquable durée pour l’époque. Il familiarise les deux côtés de l’Atlantique au travail en commun, un acquis important pour la suite (tous les grands projets spatiaux sont aujourd’hui conduits en coopération internationale). Il contribue à réchauffer les relations franco-américaines passablement délicates en ces temps d’intervention américaine au Viêt-Nam et de retrait imminent de la France du commandement intégré de l’OTAN (effectif six mois plus tard). Une triple réussite pour cet engin dont le CNET était responsable de l’instrumentation et qui fut le tout premier satellite scientifique français jamais lancé. 


Décembre 1965, le satellite FR1 (en cours d’intégration sur son lanceur) avec, à gauche, le responsable de son instrumentation C. Fayard, et à droite, le directeur scientifique de la mission O. Storey, tous deux du CNET. 
Crédit Techno-Science.Net.






… et deux autres mondiales
 
Aussi en 1959 et toujours sous le choc de Spoutnik, les Etats-Unis annoncent la mise en route d’un programme de satellites de télécommunications. Il faut être deux pour communiquer et, comme pour le cas précédent, ils invitent leurs alliés à s’associer aux premières expérimentations.
 
Au CNET, son directeur Pierre Marzin suit les travaux américains depuis des années. Il pense qu’il faut saisir l’occasion et en convainc le CRS. La première étape pour les Américains consistera à lancer un satellite-ballon passif de 30 mètres de diamètre, gonflé en orbite. Il sera recouvert d’une surface métallisée permettant, comme son nom « Echo » l’indique, la réflexion d’ondes hertziennes entre deux points du globe. Bien que cette première expérimentation ne concerne que le territoire américain, le principe retenu permet une diffusion plus large du signal. Avec l’accord du CRS, le CNET réalise donc un système d’antenne à même de le recevoir à Issy-les-Moulineaux. Il semble toutefois que ce ne soit pas sur le site du CNET mais au Fort d’Issy - qui sert à l’époque souvent de site d’expérimentation de transmissions - que l’antenne soit finalement installée, probablement pour profiter d’un horizon plus dégagé.
 
Le satellite Echo 1A est lancé le 12 août 1960. Dès le premier jour puis les jours suivants, il renvoie un message du président Eisenhower de la côte ouest des Etats-Unis à sa côte est. Et l’écho de ce signal est effectivement reçu … à Issy ! C’est probablement la toute première transmission hertzienne transocéanique au monde *. C’est un événement clé de l’histoire des communications, et même de l’histoire tout court. Fort de ce succès, le CNET construira une deuxième antenne améliorée et plus encombrante qu’il montera sur le site du radiotélescope de Nançay dans le Cher et qui recevra d’autres signaux à partir de décembre. 



1960, l’antenne conçue, montée et opérée par le CNET qui capta à Issy-les-Moulineaux les premiers signaux hertziens en provenance des Etats-Unis. Crédit DGT/CNET.


* " probablement " car il n’a pas été possible, pour cet article, de retrouver la date exacte de cette réception - dans tous les cas comprise entre les 12 et 20 août 1960 -  et donc d’en revendiquer l’absolue primauté. Tout *lecteur disposant d’informations plus précises sur cette date sera le bienvenu ! 


La littérature scientifique est toutefois formelle : ce qui a été reçu à Issy est un « signal » et non un « message », c.à.d. non exploitable, ce qui résulte du principe rudimentaire choisi par les Américains, un simple écho. Ceux-ci annoncent du reste y renoncer pour la suite et passer à une deuxième génération de satellites plus évolués, cette fois à répétiteurs actifs.
 
Marzin, et derrière lui De Gaulle sont convaincus qu’ils sont l’avenir et qu’il faut immédiatement y associer la France. Un accord est signé en avril 1961 entre les deux pays, au titre duquel le CNET réalisera une première station européenne de réception. 
 
Les temps sont très courts. Malgré la préférence de De Gaulle pour un émetteur-récepteur entièrement français, il faut y renoncer au profit d’un exemplaire identique à ceux que construisent les Etats-Unis pour eux-mêmes, mais complété, monté et opéré par le CNET. Il prend, comme pour celui utilisé pour Echo 1, la forme d’une sorte de gigantesque cornet acoustique, mais en réalité évidemment électronique, qui semble tout droit sorti du cerveau d’un professeur Tournesol dérangé. Le cornet d’Echo 1 mesurait 15 mètres de long, celui désormais prévu en mesure … 54 (la référence à Tournesol n’est pas déplacée. Quelques années plus tard, le cornet d’Echo 1 recevra des rayonnements inexpliqués qui se révéleront être ceux du fond cosmologique diffus, première image du « big-bang » et l’une des plus grandes découvertes de l’astrophysique).
 
Pour des raisons de taille et d’orientation, il faut renoncer à installer ce cornet de 54 mètres à Issy. Le CNET le monte donc sous un radôme construit à proximité d’une annexe qu’il ouvre à Lannion en Bretagne : ce sera la station de Pleumeur-Bodou. Elle est prête et opérationnelle en un temps record. Le satellite Telstar 1 est lancé le 10 juillet 1962. Quelques heures plus tard le 11 juillet à 0h 49, le CNET reçoit d’Amérique les premières images télévisées ayant jamais traversé un océan, d’une parfaite qualité. L’ère des télécommunications intercontinentales commence. La transmission dure 20 minutes, ainsi qu’il était prévu. Elle déclenche un engouement médiatique considérable. L’opération sera répétée dans les deux sens avec succès dans les jours et semaines suivants. Le processus est très vite opérationnel. Dès le 23 juillet débutent les premières transmissions publiques en mondovision.


Mi-1962, l’étonnante antenne de 54 m de long, montée et opérée par le CNET, qui reçut à Pleumeur-Bodou les premières transmissions TV transocéaniques de l’histoire. Le personnage au milieu donne l’échelle. 

Au nord …
 
En 1961, toujours dans le contexte d’indépendance gaullienne, le CNET commence le développement d’un radiotélescope d’un type nouveau, plus spécialement adapté à l’étude des ondes électromagnétiques en provenance de la haute atmosphère et de l’espace proche. Soutenu par la communauté des radioastronomes, et conduit avec l’aide du CNRS puis du CNES, le projet donne naissance au Radar à diffusion incohérente de Saint-Santin (du nom d’une commune du Cantal où il sera en partie installé). Opérationnel à partir de 1965, il permet de réaliser la première carte thermique de la haute atmosphère.
 
Des améliorations apportées à partir de 1967 élargissent son champ à l’étude des aurores boréales et autres phénomènes de la région polaire. C’est une des priorités scientifiques du CRS retenues six ans plus tôt par De Gaulle. La France propose alors la création d’un organisme international dédié à ces sujets. Ce sera lEISCAT ou European Incoherent Scatter Scientific Association, fondée en 1975 et regroupant initialement France, Finlande, Norvège, Suède, Allemagne et Royaume-Uni. Devenu un outil important de la communauté spatiale, l’EISCAT sert aujourd’hui à l'étude des interactions de la haute atmosphère et du champ magnétique avec le vent solaire (dont toujours les aurores boréales), au suivi des météorites et débris spatiaux, à la science du GPS, à la météorologie, et à la recherche sur le climat.

… et à l’Est !
 
Le 25 juin 1966, le général De Gaulle engage un voyage historique d’une semaine dans l’URSS brejnévienne. Il devient le premier dirigeant occidental à visiter le centre spatial de Baïkonour. Il signe quelques jours plus tard à Moscou un important traité de coopération spatiale entre les deux pays. Pour le général, il s’agit de « dépasser la logique d’affrontement des deux blocs », de renforcer l’autonomie de la France vis-à-vis de l’Amérique, et aussi de tirer la leçon des évidentes difficultés de l’Europe à développer en commun un lanceur puissant (la fusée Europa, qui sera du reste bientôt abandonnée au profit du projet franco-européen Ariane). Ce traité servira de cadre à la coopération entre les deux pays jusqu’à l’invasion de l’Ukraine.
 
Sa première application en est la réalisation d’un satellite français ROSEAU dédié à l'étude de la magnétosphère. Il sera lancé par une fusée soviétique. L’instrumentation en est de nouveau confiée au CNET et François du Castel - qui y conduit toujours le Département spatial - est le directeur scientifique du programme. Bien que soutenu par la communauté scientifique, celui-ci sera malheureusement annulé deux ans plus tard au lendemain des événements de mai 1968 pour des raisons budgétaires. Il sera ultérieurement remplacé par deux satellites Sret 1 & 2 plus modestes, effectivement lancés par l’URSS au début des années 1970, mais de moindre implication CNET.

Interlocuteur et équipementier
 
Le CNET participe à de nombreux autres programmes spatiaux de moindre importance qu’il serait fastidieux de citer. A la fin des années 1960, le spatial occupe près d’un tiers de son personnel et représente les deux tiers de son budget (l’espace coûte cher !). Mais il reste un centre de recherche. La montée en puissance du CNES et des grands industriels (Aérospatiale, Matra, Thomson, Alcatel …) jointe à la maturation progressive des programmes spatiaux font que son temps est bientôt révolu comme maître d’œuvre, que ce soit d’un programme spatial entier ou de son instrumentation. Son rôle comme équipementier et/ou interlocuteur reste. Le CNET sera notamment impliqué dans la réalisation des satellites européens expérimentaux « Orbital Test Satellite » ou OTS en orbite à partir de 1977, de ceux de télécommunication entre navires et terre ferme « Maritime European Communications Satellite » ou MARECS (1981), des premiers satellites opérationnels européens « European Communication Satellite » ou ECS (1983), ou encore des premiers satellites opérationnels français TELECOM 1A et 1B (1984).
 
Il deviendra l’interlocuteur technique français d’INTELSAT, l’organisation internationale qui gère l’utilisation des satellites de télécommunications d’origine américaine. Et comme il est rappelé dans un autre d’article d’Historim, il participera à la création d’EUTELSAT, l’homologue européen d’Intelsat qui sera d’ailleurs abrité dans les locaux CNET d’Issy avant de se transférer à la tour Montparnasse à Paris, puis dans le quartier de la porte Balard (très exactement rue de la Montagne-de-la-Farge) avant de revenir… à Issy-les-Moulineaux, à un jet de pierre du site historique du CNET.

Pierre Baland, ingénieur spatial
1er mai 2025

Principales sources :  
-  ATTEN Michel, La construction du CNET, 1940-1965, éditeur Réseaux. Communication-Technologie-Société, 1996
-  BERTHO Alain, Le CNET dans le système de recherche publique, éditeur CNET, 1986
-  GUILLOU Michel, Les débuts des télécommunications par satellites (1959-1969), éditeur IGPDE
-  Revue « Air & Cosmos »
-  sites NASA

Encore merci pour la richesse de ce document. 
Un regret exprimé par les « anciens » des télécoms : il n’y a aucune mention du CNET dans le nouveau cœur de ville. J.M. Maestracci