4 mars 2016

Odette, Isséenne depuis plusieurs décennies (suite)

Voici, comme promis, la suite du témoignage d'Odette, toujours aussi souriante…

Odette. Ph. P. Maestracci
La résidence Matrat-Voisembert
Depuis juin 1943, Odette habite avec sa famille dans la résidence Matrat-Voisembert, un ensemble de bâtiments construits dans les années Trente, avant-gardistes pour l’époque et destinés à une clientèle choisie (ci-dessous). Les toits plats étaient prévus pour servir de solarium. Les appartements au nombre de deux par palier avec des portes à double battant, sont grands et disposaient d’une lingerie qui pouvait servir de chambre.
Façades des immeubles années Trente. © XDR
En effet, bon nombre de familles de militaires habitaient là car ils étaient proches du ministère de l’Air et desServices techniques des constructions navales (et son bassin des carènes, construit par Perret) un peu plus loin vers la Seine. Les ordonnances des officiers occupaient ces chambres et disposaient d’une douche et de toilettes installées de part et d’autre des passerelles à l’arrière des immeubles. Un renfoncement sur les passerelles permettait d’installer un petit brasero à proximité des douches. Il est à noter que le ministère de la Défense inauguré en 2015 est toujours aussi proche de la résidence !
La résidence abrita également avant-guerre, une colonie de Russes « blancs », comme dans d’autres immeubles de la commune.

Les commerces
Au rez-de-chaussée des rues Matrat et Voisembert, de nombreux commerces permettaient de vivre quasiment en autarcie. Rue Matrat : le cabinet médical d’un ORL, un coiffeur au n°1, une épicerie au 5. Rue Voisembert : au n°1 un marchand de journaux et une boucherie, une grande épicerie au 3 , une pharmacie au 5. À l’angle des rues Matrat et Georges Marie, une crémerie Le Cercle Bleu et une boulangerie (qui existe encore). Tout près, un serrurier de la rue Georges Marie travaillait pour les résidents. Enfin, il y avait au sous-sol une pompe à essence et un garagiste qui réparait et lavait les voitures.
Ces commerces ont disparu et les boutiques des deux rues remplacées par des appartements lors du ravalement il y a quelques années. D’autre part, il n’y a plus d’odeur ni de poussière de tabac dans les appartements depuis la fermeture en 1978 de la très proche Manufacture des Tabacs inaugurée en 1904.

Le quartier après-guerre
Il y eut longtemps un marchand de charbon, « un bougnat », à l’angle des rues G. Marie et Hartmann. Un immeuble résidentiel occupe son emplacement. Un peu plus loin, un pavillon en meulière rue Gabrielle d’Estrées fut occupé par la violoniste Ginette Neveu morte tragiquement en 1949 dans un accident d’avion aux Açores qui fit périr aussi Marcel Cerdan.

Rue Ernest Renan.
À l’angle des rues Ernest Renan et Oradour-sur-Glane se trouvait « une Halle aux grains » qui avait « une porte énorme », sorte d’entrepôt à proximité du pavillon de l’octroi. Ce bâtiment servit ensuite à stocker les moquettes placées dans les halls du Parc des Expositions de la Porte de Versailles. Il est remplacé par un vaste hôtel de nos jours. Aux numéros pairs de la rue Renan, il y avait ensuite un café, une boulangerie et une auto-école.
Une clinique existait rue de la Villa Marguerite et juste à l’angle, un bazar remplacé par un restaurant puis au-delà une boucherie chevaline et l’imprimerie Desfossés. De l’autre côté de la rue Renan, entre le square Fournieret la rue du Quatre-Septembre, il y eut l’entreprise Javel-La Croix, d’abord été remplacée par le bureau des Eaux et Forêts (ministère de l’Agriculture) puis un cabinet d’experts-comptables. À côté, une école d’apprentissage du bâtiment était installée square Fournier. La rue Foucher Lepelletier desservait des jardins ouvriers et l’imprimerie Desfossés, tous remplacés par des immeubles et des jardins d’agrément. Rue du Général Leclerc, face à l’Hôtel de Ville et à l’emplacement du Centre administratif, se tenait « la cour des miracles avec des vieilles baraques et des rues comme au Moyen-Âge ».


Eglise Saint-Benoît. ©XDR
La paroisse Saint Benoît
Odette a connu l’ancienne chapelle où, du fait de son statut, aucune célébration de mariage ni d’enterrement ne pouvait se dérouler. Le bâtiment aux gros pylônes était vétuste ; il y pleuvait. La cour était en terre. La chapelle fut démolie en 1971 et remplacée par une église moderne en sous-sol, une vaste cour dallée encadrée par des salles (ci-contre). Le père Guesdon en fut le premier curé lorsque la chapelle fut remplacée par une église. Il est à noter que furent prévus des logements pour les prêtres.
Odette aida le père Lefort pour le pré-catéchisme et les ventes de charité devenues Journées d’amitié, toujours organisées chaque année le dernier week-end de novembre. De longues années et pour cette occasion, Odette prépara le petit-déjeuner pour ceux qui assistaient à la messe de 7 heures du matin. Elle fut responsable du textile pendant vingt-et-un ans. Un grossiste près de la place de la République vendait du linge de maison. Il fallait aller chercher les cartons huit jours avant la vente, préparer le linge pour l’exposer et rapporter les éventuels invendus la semaine suivante. Odette apporta aussi son aide pour déballer les bibelots et objets vendus dans les salles consacrées à la brocante.
Avec son groupe, Odette étudie la Bible tous les 15 jours. Après l’Ancien Testament, c’est l’étude du Nouveau Testament. D’autre part, une séance mensuelle de réflexion porte sur la question : « À quoi sert un chrétien ? ». Il y a le Rosaire une fois par mois chez l’une ou l’autre des participantes. La méditation précède la récitation du chapelet. Enfin, il y a un Chapelet en octobre puis en mai. Cela pendant 4 jours du mardi au vendredi.

Saint Benoît. © XDR
C’est avec reconnaissance que je remercie Odette qui a très chaleureusement accepté de me recevoir pour narrer ses souvenirs heureux ou plus douloureux. Merci aussi à Madame Colette Provôt qui m’a fait rencontrer la formidable Odette. P. Maestracci

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