7 janvier 2019

Les archers d'Issy-les-Moulineaux

Le samedi 24 novembre 2018, un groupe d'Historimiens est accueilli dans les locaux de l'Arc Club Sportif d'Issy les Moulineaux (ACSIM), par Alexandra - pour laquelle il faudrait créer le néologisme d’« arcophilissime » (amateur de tir à l’arc = toxophile) tant elle présente avec fougue sa passion pour le tir à l’arc - , et par le tout autant passionné Arnaud, président de l'ACSIM  depuis un an. Tous deux présentent leur association, son histoire et celle du tir à l’arc lors de cette visite hors du commun. Un grand merci à eux deux pour leur chaleureux accueil.

Alexandra et Arnaud portant le fanion
de l'association. © A. Bétry

Histoire de l’association

L'association est créée en 1936 par M. Raymond Jobert qui en fut le premier président (source le journal Tir à l’Arc, n°290, 20 avril 1936) même s’il est probable qu’il y eut déjà une structure vers 1910. Une dissolution fut imposée en 1942 sous le Régime de Vichy mais l’association renaquit en 1951. Elle compte aujourd’hui 220 membres parmi lesquels certains champions : Florian Bossard, Jérôme Bidault, Mylène Bouteleux, Laurena Villard … Le président Arnaud cite également parmi les archers français M. Valladont, médaille d’argent aux JO de Rio (2016).

L’origine des Compagnies d’Arc remonte en France au Moyen Âge. En effet, l’armée royale française subit, entre autres, une défaite sanglante en 1415 à Azincourt (Pas-de-Calais) face aux redoutables archers britanniques. Les Français durent en conséquence, eux aussi, former des compagnies d’archers dans les villes qui se lançaient des défis dont la tradition du "Bouquet provincial" perpétue le souvenir.

Affiche, 2017. © A. Bétry
Ces compagnies se placent sous la protection de Saint Sébastien (ci-contre). Celui-ci, officier romain devenu chrétien, est martyrisé vers 288 à Rome sur ordre de l’empereur Dioclétien : il est d’abord percé de flèches, sauvé par Sainte Irène avant de mourir lapidé. Son cadavre est jeté à l’égout. Il est comme Saint Roch, protecteur contre la peste. Un superbe tableau de Mantegna le représentant se trouve dans la grande galerie du Louvre.

La Révolution française met fin aux compagnies d’arc. Mais Napoléon qui a été archer dans sa jeunesse, les rétablit, bannissant toute notion religieuse. Il faut attendre 1899 pour la création de la Fédération des Compagnies d’Arc d’Île de France, en vue des JO de 1900 à Paris. Cette structure prendra le nom de Fédération Française de Tir à l’Arc en 1928.

Locaux de l’ACSIM

L’association dispose de locaux le long du Palais des Sports Robert Charpentier. Le pas de tir se tenait dans les années 1950 à l'angle des rues Charlot et du Général Éboué, puis au 6 boulevard des Frères Voisin, depuis 2006.

Médailles. © A. Bétry
L’accueil se fait dans la salle d’armes qui porte le nom d’Alain Bouant, président de 1990 à 2004 et, depuis, président d’honneur de l’association. Une salle d’armes est utilisée pour monter son matériel et un atelier (avec métier à cordes, coupe-tubes etc) pour le réparer. Y sont exposées de nombreuses coupes sur des étagères mais aussi des médailles (ci-contre) et des assiettes commémoratives, des affiches. Le long d’un mur sont suspendus des arcs de toutes tailles pour gauchers et droitiers. Ce matériel sert aux débutants (à partir de 12 ans) car, ensuite, les archers disposent de leur propre matériel. Dans la salle d’armes, l’ancien bar de la salle Jobert (du nom du fondateur en 1936) a été conservé avec le logo originel de l'Avia-Club pour y garder les archives et les revues. Un bar contemporain lui face à l’opposé de la salle.

Le matériel

Il est présenté par Arnaud et Alexandra qui répondent avec patience aux nombreuses questions des Historimiens (ci-dessous).
Tout d’abord les flèches. Les premières furent en bois, puis au début du XXe siècle en métal provenant des rebuts des usines proches. Elles ont des plumes permettant de stabiliser la flèche lors de sa trajectoire en parabole. Les flèches actuelles sont en aluminium et/ou en carbone. Elles peuvent dépasser les 200 km/h, voire atteindre les 300 km/h ! Elles percent des gilets pare-balles…

Alexandra et Arnaud en pleine explication. © A. Bétry

Les arcs ont plusieurs formes. Quand un arc est droit, c’est un long-bow en bois, dont le modèle fut anglais, (bouleau de Finlande ou bois plus onéreux). Certains arcs sont recourbés aux deux extrémités. Les plus récents en métal-carbone disposent d’une poignée, le grip, d’un stabilisateur pour déplacer le centre de gravité et faire moins vibrer le poignet. Arnaud présente enfin l’arc à poulie, encore plus sophistiqué, d’origine étatsunienne apparu lors de la guerre du Viêt-nam (1964-1973) et toujours utilisé pour la chasse. Cet arc à poulie dispose en plus d’un système de visée avec loupe. Pour autant, seul l’arc classique est homologué pour les Jeux Olympiques.
Le matériel est vendu dans plusieurs archeries en Région parisienne comme à la Porte de Vincennes ou à Antony (Hauts-de-Seine). Il y a aussi un fabricant français comme "Arc Système" et "Uukha". Le matériel pour les archers confirmés peut être réalisé sur mesure.

D’autres civilisations ont des traditions spécifiques. Au Japon, l’arc traditionnel est asymétrique. Les Mongols tirant à l’arc à cheval, leur arc est petit pour ne pas gêner la monture. Les Sud-Coréens sont initiés dès l’école et les Sud-Coréennes sont les meilleures du monde, Alexandra dixit. En Amérique du sud, les flèches peuvent atteindre les 2 mètres de long, « des sagaies pour abattre les oiseaux ».

L'ACSIM et les compétitions

D’après les résultats publiés dans les journaux de tir à l’arc, ainsi que les mémoires des anciens, l’association a compté depuis les années 1960 des archers compétiteurs de haut niveau. Plusieurs noms d’archers isséens étaient ainsi régulièrement retrouvés dans les classements de Championnats de France ainsi qu’à l’international – citons Claude Sauvard, membre de l’équipe de France de tir en campagne. Depuis cette période, et le retour du tir à l’arc aux Jeux Olympiques de 1972 aidant, l’association s’est fortement orientée vers les compétitions … tout en conservant une petite partie traditionnelle. Ainsi en 2018, les archers d’Issy-les-Moulineaux ont répondu présents sur les Championnats de France de quasiment toutes les disciplines, par équipe comme en épreuve individuelle.


Animaux en mousse utilisés
pour le Tir 3D. © PCB
Les épreuves

Elles sont multiples, du tir à 18 mètres en salle aux 50 à 70 mètres en extérieur.

Il y a aussi le Tir en campagne organisé chaque année, dans le cas des championnats de France par équipes, par la compagnie victorieuse l’année précédente. Il s’agit d’un parcours de 24 cibles dont les distances sont variables et en partie inconnues. L’ACSIM fut l’organisateur du Championnat de France Campagne par équipes de club de 2013, dans le parc du lycée Michelet à Vanves.
Les cibles rondes sont en papier. Les flèches doivent se planter à l’intérieur du cercle et si possible à l’intersection de 2 diamètres. Il y a aussi des animaux dessinés sur papier ou des reproductions en 3D.

Chaque année, est décerné le titre de roi de l’association à celui qui « abat » un oiseau factice à la distance de 50 mètres. Un empereur obtient ce titre à vie s’il est roi 3 années de suite. Les rois (ou reines) de chaque club ou compagnie se confrontent ensuite pour le titre de roi de France par une variante : le tir à la perche (surtout pratiqué dans le Nord et en Belgique). Il s’agit de faire tomber des oiseaux factices grâce à des flèches au bout aplati.

Chaque année, est organisé le Bouquet provincial dans un lieu différent avec une affiche personnalisée mais avec une cible bien visible. C’est ainsi que 1 600 archers ont participé en 2018 aussi tirs du Bouquet organisés par Angy (Oise). Les épreuves permettent d’établir un classement. P. Maestracci

Rendez-vous à ne pas manquer:
La Coupe des Miss, 10e édition : tournoi féminin organisé au Palais des Sports Robert Charpentier, les 9 et 10 mars 2019.
Entrée gratuite.


Pour en savoir plus 
Arc Club Sportif d’Issy-les-Moulineaux,
6 boulevard des Frères Voisin, 92130 Issy-les-Moulineaux.
Site : www.arcclubissy.fr ; contact : arcclub.issy@gmail.com

Dans la salle d'armes, des arcs attendent les archers. © A. Bétry